La preuve des inscriptions informatisées 

David G. Masse
© 1997

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Texte d'une conférence donnée par l'auteur dans le cadre du programme de formation permanente du Barreau du Québec à l'occasion du Congrès Annuel, publié dans Congrès Annuel du Barreau du Québec (1997), à la page 429, faisant partie de la collection Dévelopements récents.
 
 TABLE DES MATIÈRES1
-Historique et mise en contexte. . . 1
-Vers une bonne compréhension de la technologie. . . 8
-Les qualités essentielles des documents numériques. . . 18
-L'indépendance du document numérique. . . 20
-La malléabilité du document numérique. . . 23
-Une problématique mondiale. . . 28
-Un outil pour faciliter l'analyse. . . 30
-L'inscription informatisée en tant qu'acte juridique: le message. . . 32
-L'inscription informatisée en tant que fait matériel: le rapport . . . 34
-La situation en droit québécois. . . 36
-Avant le 1er janvier 1994. . . 39
-La preuve de l'acte juridique. . . 43
-La preuve du fait matériel. . . 73
-L'inscription informatisée sous le Code civil du Québec. . . . 84
-Actes juridiques. . . 91
-Admissibilité. . . 93
-Valeur probante. . . 95
-Faits matériels. . . 107
-Admissibilité. . . 109
-Valeur probante. . . 120
-Les documents numériques et les dispositions statutaires particulières. . . 122
-Certaines lois provinciales. . . 123
-Le Code de procédure pénale. . . 127
-La Loi sur la preuve au fédéral. . . 129
-Juridiction, domaines d'application et modalités. . . 130
-Jurisprudence sur l'admissibilité des inscriptions informatisées. . . 132
-La situation juridique à l'extérieur du Québec. . . . . 144
-L'initiative de l'Organisation des Nations-Unies. . . 145
-Loi modèle de la CNUDCI. . . 147
-La situation ailleurs au Canada. . . 156
-La preuve du fait matériel. . . 157
-La preuve de l'acte juridique. . . 168
-La situation aux États-Unis. . . 175
-La preuve du fait matériel. . . 177
-La preuve de l'acte juridique. . . 192
-La situation en Europe. . . 204
-Synthèse: l'intégrité de l'information numérique. . . 217
-Stockage. . . 223
-Transmission. . . 225
-Intégrité. . . 228
-La sécurité des données en réseau fermé. . . 231
-La sécurité des données en réseau ouvert. . . . 260
-Recommandations pratiques. . . 266

-Conclusion. . . 281

-BIBLIOGRAPHIE 


[1]  Historique et mise en contexte

[2]  L'ordinateur est parmi nous maintenant depuis 1940.2 Au début les ordinateurs étaient très encombrants et très dispendieux, et donc forcément très rares. Nous avons été témoins de la croissance tout à fait extraordinaire de l'utilisation de cet outil et nous vivons maintenant une réalité qui fait de l'ordinateur un facteur presque omniprésent. L'ordinateur est maintenant à la source de presque la totalité des informations que nous recevons et que nous diffusons. Que ce soit les nouvelles que nous lisons, les données de nos systèmes comptables, le produit de nos traitements de textes ou le courrier électronique que nous commençons à utiliser, l'ordinateur y joue un rôle essentiel. Les grandes et moyennes entreprises font affaires de plus en plus par le biais de l'échange de données informatisées ("EDI") et les informations sur lesquelles nous fondons nos décisions existent généralement dans des bases de données.

[3]  De plus en plus le support traditionnel qu'est le document sur support papier perd du terrain en tant que support universel pour les informations. Nous commençons à voir naître des informations qui n'ont pas de source papier et qui n'existent jamais autrement que sur support informatique. Un exemple très courant de ce genre d'information complètement virtuelle est l'affichage d'informations puisées d'une base de données suite à une recherche effectuée à distance par le biais d'Internet.3

[4]  Ce changement très profond dans nos communications écrites bouleverse une tradition fondée sur le papier avec laquelle la société humaine vit depuis au moins le 15e siècle.4 Quels en sont les impacts pour les juristes?

[5]  Parmi les nombreux impacts, l'un se distingue comme ayant une importance de premier ordre. Comment faire la preuve de ce nouveau phénomène qu'est l'inscription informatisée? C'est la question à laquelle cet article se veut une réponse.

[6]  Nous commencerons en étudiant la nature même de l'inscription informatisée et la façon qu'elle se distingue des documents sur support papier avec lesquels nous sommes familiers. Nous verrons ensuite les problèmes juridiques soulevés par la numérisation. Nous situerons la problématique en droit québécois pour ensuite explorer la scène juridique du point de vue du droit comparé.

[7]  Enfin, nous verrons quelles mesures s'imposent pour les justiciables qui auront intérêt à faire la preuve des inscriptions informatisées qu'ils créent ou qu'ils recueillent dans le cours de leurs activités. 

[8]  Vers une bonne compréhension de la technologie

[9]  Quelles sont les règles du jeux dans le monde numérique? Nous entendons maintenant parler de publications "électroniques", de commerce "électronique", de documents et de transactions "dématérialisés". Autrefois, nous parlions de données sur bandes magnétiques, et puis de données sur disques et disquettes et maintenant de cédéroms. De quoi en réalité parle-t-on?

[10]  C'est le phénomène de la numérisation et il importe de bien le comprendre afin de pouvoir bien saisir son impact sur le droit.

[11]  Par le passé, et encore aujourd'hui pour ce qui est de la vaste majorité de nos communications, nous nous fions sur de la documentation analogique. Dans la documentation analogique le genre d'informations véhiculées définit toujours le support sur lequel il s'inscrit.

[12]  Dans le domaine du texte, nous sommes en mesure de constater assez facilement le phénomène: lorsque l'objet recherché est de véhiculer rapidement de l'information sous forme de nouvelles quotidiennes, le besoin dicte un support papier léger, peu dispendieux, et susceptible de permettre l'impression de grandes quantités de textes à haute vitesse. Nous avons donc le support quasi-universel des journaux quotidiens. Lorsque le temps presse moins, lorsque les échéances sont hebdomadaires, voire mensuelles, on peut se permettre une présentation plus soignée et nous avons donc le support également quasi-universel des revues. Dans le domaine juridique, songeons au besoin d'archiver les documents sur le registre foncier. Encore une fois le besoin dicte le genre de support: un papier de haute qualité propice à la conservation à long terme où les informations sont inscrites à l'intérieur de marges généreuses destinées à préserver le contenu malgré l'effritement éventuel des bords de pages à force d'usure par la consultation répétée.

[13]  Dans tous les cas des communications analogiques, le support est toujours unique et original. Même dans le cas du journal quotidien tiré sur des milliers d'exemplaires, chaque exemplaire est atomiquement, chimiquement unique car il s'agit d'un meuble corporel. C'est le phénomène de l'originalité. L'originalité du support, indissociable de l'information qu'il véhicule, prête à l'information écrite sur support papier ce caractère d'originalité.

[14]  Notre loi sur la preuve, comme celle de toutes les sociétés civilisées, a pour objet de favoriser l'exposition devant nos tribunaux de la vérité par rapport à un ensemble de faits souvent contestés. Le caractère véridique d'une information est intimement lié à son authenticité qui elle, est intimement liée à son origine. Plus on est en mesure de cerner le renseignement à son origine, plus le renseignement est authentique, et plus il est digne de confiance comme élément de preuve devant nos tribunaux.

[15]  Puisque l'originalité de l'information est indissociable de l'originalité de son support dans les communications analogiques, il n'est pas surprenant de constater que tous les régimes de preuve privilégient l'écrit et attachent énormément d'importance à l'originalité des documents mis en preuve. Il en ressort la règle de la meilleure preuve dans les pays de common law et la règle de la prééminence de l'écrit dans la hiérarchie des preuves dans les pays de tradition civiliste.5

[16]  Depuis l'avènement de l'ordinateur nous traduisons et nous produisons cependant de plus en plus notre documentation en format numérique.

[17]  La numérisation dans le domaine du texte6 c'est généralement deux choses. Soit la conversion d'une information enregistrée primitivement sur un support papier au moyen de l'alphabet (dans notre cas un langage fondé sur 26 caractères7) à un document enregistré au moyen de codes binaires (un language écrit fondé sur 2 caractères8) sur un support informatique. Ou, dans un deuxième temps, la création originale d'un document enregistré au moyen de codes binaires sur un support informatique.9 L'intérêt de la numérisation réside dans la grande simplicité du code binaire qui permet d'enregistrer et de transmettre le document par presque n'importe quel moyen ainsi que de le soumettre au traitement des systèmes informatiques. Puisque le dénominateur commun est justement la numérisation et moins le caractère "électronique" ou même "informatique" de ces documents numérisés, le terme utilisé tout au long de cet article pour désigner de telles inscriptions sera "document numérique".10 C'est un terme plus juste qui commence à être employé pour décrire le phénomène de l'inscription de données informatiques.11

[18]  Les qualités essentielles des documents numériques

[19]  Les caractéristiques les plus marquantes du document numérique sont, dans un premier temps, son indépendance et, dans un deuxième temps, sa malléabilité. 

[20]  L'indépendance du document numérique

[21]  Le document numérique est indépendant en ce sens: c'est le premier document produit par l'être humain qui n'est pas indissociable de son support physique. En effet, le document numérique peut exister sur n'importe quel support sans perdre de quelque façon sa qualité première. La série de "1" et de "0" peut être imprimée sur papier, enregistrée sur bande magnétique, transférée sur une puce, ré-imprimée sur papier, transmise sur fil, écrite à la main sur papyrus, ré- enregistrée sur puce, transmise sur les ondes et enfin captée par ordinateur et le résultat ultime sera identique au résultat primitif. Que le document numérique soit un document, une image, une trame sonore ou un vidéo, pour autant que la série de "1" et de "0" soit reproduite fidèlement, le résultat sera le même.

[22]  Le document numérique est donc dans un certain sens l'expression humaine parfaitement abstraite et complètement virtuelle. Alors que le support sur lequel le document numérique est inscrit est bien tangible, corporel et donc unique en son genre, l'oeuvre se dissocie de son support et s'envole vers un nouveau support momentanément. Tout au cours de son existence, elle ne cesse de changer de support. Elle n'a donc pas de lien indissociable avec son support. Par le fait même, elle n'a pas d'originalité essentielle. 

[23]  La malléabilité du document numérique

[24]  La deuxième caractéristique marquante du document numérique c'est sa malléabilité. Puisque le document numérique n'est jamais rien de plus qu'une série de bits inscrits sur un support informatique12, il devient très facile de modifier le document en modifiant la série de bits. Une fois modifié, il devient pratiquement impossible de distinguer l'original du faux.

[25]  Dans le cas des documents sur support papier, le faux est évidemment possible. Mais l'indissociabilité entre l'information et son support oblige celui qui voudrait falsifier le document à falsifier non seulement le renseignement, mais également le support sur lequel il est inscrit. Ceci s'avère une tâche souvent très compliquée, surtout lorsque le support, comme c'est le cas avec les billets de banque, est d'une composition physique telle que la falsification devient pratiquement impossible.

[26]  Cette indépendance et cette malléabilité du document numérique font à la fois sa grande force et sa grande faiblesse. Sa force, car le document numérique est très facilement transmissible et peut se retransmettre à l'infini sans être dénaturé, sa faiblesse car il est impossible de distinguer une instance d'un document numérique d'une autre ni d'apprécier la source des modifications que le document numérique a pu subir en cours de route. Cette faiblesse pose un défi important tant pour la technologie que pour nos règles de preuve. En effet, le plus important principe de notre loi sur la preuve est fondé sur l'indissociabilité entre le document analogique et son support physique: la règle de la meilleure preuve. Quelle approche devons-nous donc prendre en matière de preuve des documents numériques? Nous verrons que la technologie a su maîtriser le défi de la numérisation. Notre droit peut-il en faire autant?

[27]  Heureusement nous ne sommes pas seuls face à ce défi. Toutes les juridictions s'affrontent mondialement au même phénomène. 

[28]  Une problématique mondiale

[29]  Dans une certaine mesure nous pouvions autrefois nous contenter comme juristes de bien comprendre nos propres lois sans vraiment devoir comprendre les lois en vigueur ailleurs. Nous vivons cependant dans un monde de plus en plus petit. Le même phénomène de l'informatisation, qui pose pour notre droit le défi du document numérique, supprime la distance comme un facteur limitant les échanges entre nations et rapproche de plus en plus les économies nationales autrefois plus indépendantes les unes des autres. C'est le phénomème de la globalisation. Il devient de plus en plus fréquent pour nos entreprises de transiger à l'étranger. De plus en plus souvent, le moyen de communication privilégié est la communication de données numérisées. Nous devons donc bien saisir la situation dans notre propre droit mais également comprendre la situation qui règne ailleurs, car nos clients auront de plus en plus à faire la preuve de leurs documents numériques ailleurs qu'au Québec. Nous étudierons la problématique en premier lieu en droit québécois pour ensuite jeter un regard sur l'approche adoptée ailleurs. 

[30]  Un outil pour faciliter l'analyse

[31]  Le sujet qui nous occupe est un sujet vaste et complexe et il est donc important d'adopter une approche qui nous permettra de cerner le problème dans un faisceau déterminé et restreint afin de faciliter l'analyse juridique que nous devrons faire. Prenons donc deux cas hypothétiques simples et distincts: 

[32]  L'inscription informatisée en tant qu'acte juridique: le message

[33]  Andrée, la directrice des ventes du manufacturier de véhicules automobiles Acme, assise à son poste de travail, rédige et transmet à ses concessionnaires par courrier électronique un message par lequel le manufacturier fait une offre de vendre au premier concessionnaire qui lui transmet une acceptation, un lot unique de 35 automobiles à un prix de rabais. Au bas de son message Andrée tape: "(s) Andrée, Directrice des ventes - Acme". Benoît, directeur des achats chez le concessionnaire Automobiles Beauchemin, se croit le premier à lui transmettre un message par courrier électronique acceptant cette offre. Le manufacturier Acme vend le lot de véhicules à Automobiles Crésus. Automobiles Beauchemin poursuit le manufacturier Acme pour bris de contrat et désire produire l'impression sur papier du message envoyé par Andrée. Le manufacturier s'objecte. 
[34]  L'inscription informatisée en tant que fait matériel: le rapport
[35] Doris, employée de la compagnie de chemin de fer, rédige au clavier de son poste de travail un rapport à l'effet qu'elle a constaté qu'un véhicule neuf remis aux fins de transport par le manufacturier, est endommagé. Ce constat est inscrit dans la base de données de la compagnie de chemin de fer. Le véhicule est livré au concessionnaire Automobiles Crésus par un transporteur local. Un litige survient entre Acme le manufacturier, le concessionnaire et le transporteur local concernant les dommages affectant le véhicule. Doris a depuis quitté son emploi et est introuvable. Automobiles Crésus désire produire l'impression sur papier du rapport rédigé par Doris. Le manufacturier s'objecte.
[36]  La situation en droit québécois

[37]  Avec l'entrée en vigueur de notre nouveau Code civil le 1er janvier 1994, le Québec est devenu une des rares juridictions à adopter des dispositions précises visant la preuve des documents numériques. Ces articles du Code civil du Québec se trouvent aux articles 2837 C.c.Q. et suivants. Avant d'aborder l'étude de ces articles, il convient d'étudier le sort du document numérique aux termes de l'ancien droit, c'est-à-dire sous le Code civil du Bas-Canada.

[38]  Ce retour en arrière se justifie pour plusieurs raisons. Premièrement, il permettra de mieux comprendre, non seulement la portée des nouveaux articles, mais également le défi que posent les documents numériques pour les notions traditionnelles de la loi sur la preuve. Cette étude préliminaire nous permettra également de voir d'un oeil plus critique ces nouveaux articles que nos tribunaux auront à appliquer éventuellement et de mieux comprendre les régimes de preuve en vigueur ailleurs. Enfin, les dispositions de l'ancien Code civil demeurent en vigueur dans une certaine mesure en raison des dispositions du droit transitoire et les juristes peuvent encore être appelés à faire la preuve du document numérique selon les anciennes règles. 

[39]  Avant le 1er janvier 1994

[40]  En matière de preuve, c'est l'article 141 de la Loi sur l'application de la réforme du Code civil du Québec L.Q. 1992 c.57 qui s'applique et qui rend applicable les règles de preuve sous l'ancien code en ce qui concerne les actes juridiques et les faits qui ont eu lieu avant le 1er janvier 1994:

[41] "Article 141

En matière de preuve préconstituée et de présomptions légales, la loi en vigueur au jour de la conclusion de l'acte juridique ou de la survenance des faits s'applique."

[42]  Les dispositions de l'ancien code demeureront donc pertinentes pour quelque temps encore. Contrairement au Code civil du Québec, le Code civil du Bas-Canada ne contient pas de dispositions destinées à faciliter la preuve des documents numériques. 

[43]  La preuve de l'acte juridique

[44]  Si le message de notre exemple est transmis avant le 1er janvier 1994, est-ce que le concessionnaire sera en mesure de faire la preuve de l'offre que le manufacturier lui a faite?

[45]  Etant donné la valeur élevée du lot de véhicules, le concessionnaire se heurtera aux dispositions de l'article 1235 C.c.B.-C.:13

"Dans les matières commerciales où la somme de deniers ou la valeur dont il s'agit excède 1 000 $, aucune action ou exception ne peut être maintenue contre une personne ou ses représentants sans un écrit signé par elle dans les cas suivants:

1. De toute promesse ou reconnaissance à l'effet de soustraire une dette aux dispositions de la loi relatives à la prescription des actions;

2. De toute promesse ou ratification par un majeur d'obligations par lui contractées pendant sa minorité

3. De toute représentation, garantie ou assurance en faveur d'une personne dans le but de lui faire obtenir du crédit, de l'argent ou des effets;

4. De tout contrat pour la vente d'effets, à moins que l'acheteur n'en ait accepté ou reçu une partie ou n'ait donné des arrhes.

La règle qui précède a lieu lors même que les effets ne doivent être livrés qu'à une époque future, ou ne sont pas, au temps du contrat, prêts à être livrés."

[46]  Le concessionnaire pourra réussir dans la mesure où l'on peut considérer que le message du manufacturier est un écrit signé par lui. 

[47]  Le terme "écrit" fait l'objet d'une définition dans l'ancien Code civil à l'alinéa 12 de l'article 17:

[48]  "17 C.c.B.C.

 Les mots, termes, expressions et dispositions énumérés en la cédule qui suit, chaque fois qu'ils se rencontrent dans ce code ou dans un acte de la législature provinciale, ont le sens, la signification et l'application qui leur sont respectivement assignés dans cette cédule, et sont interprétés en la manière y indiquée à moins qu'il n'existe quelques dispositions particulières à ce contraire

[...]

12. Les mots écritures, écrits et autres, ayant la même signification, comprennent ce qui est imprimé, peint, gravé, lithographié, ou autrement tracé ou copié." [italiques de l'auteur]

[49]  Un argument peut être fait que le message d'Andrée, rédigé au clavier est un écrit car c'est soit "ce qui est imprimé" ou ce qui est "... autrement tracé". Voilà une expression très large susceptible d'ouvrir la porte à la reconnaissance de l'inscription informatisée comme un écrit.14 Quelle différence y-a-t-il entre le fait pour Andrée de dactylographier un document à l'aide d'un dactylo traditionnel, de le faire à l'aide d'un micro-ordinateur muni d'un logiciel de traitement de textes et d'une imprimante ou de le faire par le biais du poste de travail d'une informatique centrale munie d'un réseau informatique qui transmet le message au réseau du concessionnaire et l'imprime chez eux? Il n'existe entre ces hypothèses qu'une différence de quantité par rapport à la technologie utilisée entre la touche du clavier et l'impression sur papier. Nous sommes en mesure de constater que dans tous les cas mentionnés, les doigts qui actionnent les touches d'un clavier produisent le même résultat sur le papier.

[50]  Il est évident que l'impression du document numérique par l'imprimante est un écrit, mais il se peut également que le procédé informatique produise un "écrit" au sens de la loi bien avant son impression sur papier. Dans un premier temps les données sont inscrites en mémoire vive pour ensuite être inscrites sur un support le plus souvent magnétique. En fait, ces données sont le plus souvent inscrites et retranscrites plusieurs fois tout au long de leur traitement par le système informatique. Certaines étapes d'écriture des données seront purement temporaires et destinées uniquement à permettre le traitement essentiel des données, n'étant soumises à aucune intervention humaine. D'autres étapes d'écriture sont accomplies grâce à l'intervention humaine, comme c'est le cas de l'opérateur du poste de travail qui en fait une copie de sauvegarde sur disquette, ou celui du responsable du réseau qui décide d'archiver le message parmi tant d'autres pour les fins d'assurer l'intégrité du système. Enfin, dans un environnement informatique distribué client-serveur, les données sont copiées et recopiées à maintes reprises aux fins de transport sur le réseau informatique. 

[51]  La question que nous devons nous poser à ce stade relève vraiment de la règle de la meilleure preuve et c'est ici qu'un obstacle possible s'élève. Mes Trudel, Lefebvre et Parisien ont ceci à dire à ce sujet:

[52]  "La règle de la meilleure preuve peut constituer de sérieux problèmes aux plaideurs dans le cadre d'un litige en matière d'EDI.15 Par exemple, une bande magnétique constitue-t-elle la meilleure preuve d'un acte juridique conclu au moyen d'un ordinateur? Dans la mesure où elle contient des données directement saisies par l'ordinateur, elle représente probablement la meilleure preuve d'un acte juridique. Par contre, l'hypothèse de données saisies par l'ordinateur puis transférées sur une bande magnétique est certaiment plus problématique. Tel est aussi le cas du listage produit par l'ordinateur. Seule cette dernière situation nous semble toutefois pertinente puisque la production de l'information devant un tribunal doit se faire d'une manière intelligible pour le juge. Le listage constitue probablement16 une copie au sens des règles de preuve."17
[53]  En effet, la règle de la meilleure preuve, telle que consignée dans l'ancien Code civil, exige généralement la production de l'original d'un écrit et non d'une copie:
[54]  "1204 C.c.B.-C.

La preuve offerte doit être la meilleure dont le cas, par sa nature, soit susceptible.

Une preuve secondaire ou inférieure ne peut être reçue, à moins qu'au préalable il n'apparaisse que la preuve originaire ou la meilleure ne peut être fournie."

[55]      En réalité, la règle de la meilleure preuve exige tout simplement que la preuve offerte soit la meilleure possible dans les circonstances. Jean-Claude Royer écrit:
[56]  "1245 - Signification de la règle - La règle de la meilleure preuve ne signifie pas qu'un plaideur doit présenter, sous peine de perdre son procès, tous les éléments de preuve qu'il possède. Il faut interpréter cette règle de façon qualitative. Une preuve secondaire est exclue lorsqu'il existe une preuve de qualité supérieure. Ainsi, une partie ne peut établir oralement le contenu d'un contrat, lorsqu'elle est en mesure de produire l'écrit qui le constate. Dans une telle hypothèse, la meilleure preuve est la production du document. La production d'une photocopie est en principe irrecevable, lorsqu'il est possible de produire le document original." 18
[57]  Dans le cas du document numérique il deviendra donc nécessaire d'exposer devant le tribunal le fonctionnement du système informatique qui a produit le document numérique et les conditions dans lesquelles l'inscription a été conservée depuis sa composition. Chaque cas sera donc nécessairement un cas d'espèce. La fragilité évidente du document numérique exige donc un support à la mesure de fournir des garanties suffisamment sérieuses à l'effet que ce qui a été composé au clavier est bien le document numérique dont l'impression est offerte en preuve.

[58]  Dans la mesure où la preuve est faite à la satisfaction du tribunal que le système informatique en cause offre des garanties suffisamment sérieuses à l'effet que l'information tapée au clavier est fidèlement imprimée sur l'imprimante qui a produit l'écrit dont la production est demandée, nous serions en présence de l'équivalent de l'écrit produit par la même personne si elle avait été assise au clavier d'un dactylo. Nous verrons plus loin et en plus de détail les mécanismes particuliers qui contribuent à la fiabilité nécessaire pour permettre de conclure sans difficulté à la fiabilité des documents numériques.19

[59]  Dans l'hypothèse où la preuve ne permet pas de conclure en faveur de l'intégrité du système informatique entre le clavier et l'imprimante, l'imprimé ne serait plus la meilleure preuve. Il se pourrait alors, comme le suggèrent Mes Trudel, Lefebvre et Parisien, qu'une bande ou une disquette magnétique constitue la meilleure preuve de l'acte. Vu les termes larges de l'article 17 C.c.B.C., le tribunal pourrait fort bien conclure que le document inscrit sur disquette ou sur bande magnétique est un écrit au sens de la loi. J'ai posé l'argument de cette façon dans un article que j'ai écrit sur le cadre juridique des transactions sur l'inforoute:

[60] "Il n'y a rien de tellement révolutionnaire de voir l'inscription de données sur médium informatique comme de l'écriture. Le fait de se servir d'un stylo pour tracer des caractères de l'alphabet sur un papier ne se distingue pas vraiment du fait de se servir de la tête d'écriture d'un disque informatique pour polariser l'oxyde de métal sur la platine plastique d'une disquette: dans les deux cas, il y a écriture. Les seules différences sont dans le langage utilisé (les langues occidentales se servent d'un langage écrit de 26 caractères tandis que le langage informatique écrit se sert de deux caractères) et dans le moyen technologique de laisser des traces sur les média d'écriture (stylo et papier c. tête d'écriture et platine). Dans les deux cas des traces physiques sont laissées sur les média. Dirions-nous que des inscriptions latines sur des tablettes de pierre ne sont pas des écrits?"20
[61]  Les tribunaux se sont d'ailleurs montrés ouverts à une interprétation libérale de la notion de l'écrit surtout lorsqu'il était question d'appliquer à de nouvelles technologies les principes développés par rapport aux inscriptions traditionnelles sur papier.21

[62]  Si nous en venons à accepter soit l'impression, soit une inscription informatisée antérieure comme étant un "écrit" qui satisfait à la règle de la meilleure preuve au sens de la loi, nous devons franchir une dernière épreuve. S'agit-il d'un écrit qui porte la signature du manufacturier de notre exemple comme l'exige l'article 1235 C.c.B.C.?

[63]  Les auteurs s'accordent pour dire qu'en droit civil québécois la signature doit être apposée manuellement, de la main du signataire.22 Contrairement à la notion de l'écrit cependant, notre droit ne définit guère ce qu'est la signature et nos tribunaux se sont assez rarement penchés sur la question de ce qui vaut signature. Jean-Claude Royer résume ainsi:

[64] "L'absence de définition de la signature dans le Code civil du Bas-Canada a également permis à la jurisprudence québécoise de faire preuve de souplesse dans l'interprétation de cette notion. Ainsi, les tribunaux ont reconnu la validité de la signature apposée au moyen d'une croix ou d'une marque en présence d'un témoin."23

[65]  Nous verrons plus loin que les tribunaux américains, pour qui la question s'est posée à plusieurs reprises, se sont montrés beaucoup plus flexibles que les auteurs de notre doctrine sur ce qui constitue une signature valable sur un document.24

[66]  Selon les auteurs de notre doctrine de droit civil, les aspects les plus importants de la signature sont, dans un premier temps, l'identification du signataire et, dans un deuxième temps, la manifestation de sa volonté de souscrire au document sur lequel la signature est apposée. Dans l'hypothèse du système informatique qui présente des garanties suffisantes à l'effet que ce qui est tapé au clavier par Andrée s'inscrit sur papier lors de l'impression, le fait d'apposer "(s) Andrée, Directrice des ventes" suffit pour affirmer à la fois l'identité de la personne et sa volonté de souscrire au document. Tout ce que l'écriture manuscrite apporte, que cette impression mécanique n'apporte pas, c'est une possibilité d'authentification qui vient de l'originalité essentielle qu'est la trace indélébile que l'encre laisse sur le papier et le lien de ce graphisme généralement fort particulier qu'est la signature manuscrite avec la personne de son auteur.

[67]  Mais il existe également des moyens d'authentifier le message numérique et de le lier à son auteur. Le principal moyen c'est le système informatique lui-même qui est utilisé pour créer, transmettre et conserver le message. Les principaux moyens sont soit:

[68]  i) de contrôler le système en ce sens de restreindre l'accès au système aux seules personnes qui ont reçu la permission de s'en servir en instaurant un régime de permissions, en dotant chaque usager d'un mot de passe qui lui est personnel, tout en barrant de façon efficace les tiers qui n'ont pas reçu la permission de s'en servir; ou

[69]  ii) de contrôler les données qui y circulent; ou encore

[70]  iii) de contrôler à la fois le système et les données.

[71]  Nous verrons en plus grand détail ci-dessous 25 les principales méthodes qui peuvent servir à permettre l'authentification des messages. Ces méthodes, si bien implantées, peuvent donner lieu à une plus grande certitude par rapport à l'authenticité des messages numériques que la signature manuscrite est en mesure de fournir pour les documents sur support papier traditionnel.

[72]  Force est de conclure qu'un tribunal québécois aurait une marge de manoeuvre suffisante pour décider en faveur de l'admissibilité du message numérique de notre exemple comme preuve de l'acte juridique qu'il renferme. 

[73]  La preuve du fait matériel

[74]  Le fait matériel se prouve par tous les moyens,26 c'est-à- dire, entre autres, par témoignage. Donc dans notre exemple, la façon de prouver l'existence des dommages au véhicule alors qu'il était encore entre les mains du fabricant serait de faire témoigner un préposé du manufacturier qui aurait constaté ces dommages lorsque la voiture était encore sur les lieux de fabrication. A défaut d'un tel témoignage, l'on pourrait entendre Doris, la préposée de la compagnie de chemin de fer qui a constaté les dommages lors de la livraison du véhicule pour fins de transport ferroviaire. Doris étant introuvable, la seule preuve est l'inscription qu'elle a faite dans le système informatique de la compagnie de chemin de fer.

[75]  L'inscription de ces données est incontestablement un fait matériel et ce, même si aucune trace n'en demeure en existence. Mais dans notre exemple, les données sont conservées dans la base de données et l'on est en mesure d'en obtenir une impression à demande.

[76]  Le premier obstacle que le plaideur doit franchir est celui de la règle qui empêche la preuve par ouï-dire. La règle contre la preuve par ouï-dire est une règle très ancienne qui nous vient de la common law britannique et c'est une règle que nous avons en commun avec toutes les juridictions de common law. Cette règle empêche la preuve testimoniale par un témoin de faits dont il n'a pas été personnellement témoin. Cette règle s'applique bien entendu avec autant de vigueur à l'écrit sur support papier qui constate un fait matériel car cet écrit n'est ni plus ni moins que le constat de son auteur. Seul son auteur est donc apte à témoigner sur le caractère véridique des faits relatés dans un document qu'il a rédigé.

[77]  L'obstacle auquel s'affronte le document numérique en matière de ouï-dire s'applique tout autant dans le cas de tout autre fait dont on peut imaginer l'existence et ce n'est donc pas à vrai dire un problème soulevé par le caractère particulier du document numérique en tant que tel. C'est également la conclusion à laquelle en vient la Conférence sur l'harmonisation des lois au Canada.27

[78] Il existe plusieures exceptions à la règle sur le ouï-dire. Une des exceptions porte spécifiquement sur les écrits: c'est le cas de l'exception des dossiers d'entreprises.28 Pour bien comprendre l'exception, il importe de bien saisir la règle. Le tribunal apprécie la véracité du témoignage principalement en ayant le témoin présent devant le tribunal et disponible pour fins de contre-interrogatoire. Le juge est ainsi en mesure d'apprécier personnellement la mesure dans laquelle le témoin maîtrise les faits sur lesquels il témoigne ainsi que son comportement face aux questions souvent difficiles qui lui sont posées. Un document qui relate des faits ne permet généralement pas au tribunal de porter un jugement sur la véracité des faits rapportés.

[79]  Il en est autrement dans le cas des dossiers d'entreprise. Voici un passage de l'ouvrage de Jean-Claude Royer sur la preuve qui illustre bien la portée de cette exception ainsi que le raisonnement qui le sous tend:

[80]  "730 - Recevabilité et valeur probante du document rapportant un fait - Sous le Code civil du Bas- Canada, la jurisprudence québécoise a généralement admis en preuve une déclaration extrajudiciaire rapportant des faits matériels, lorsque celle-ci a été faite par un employé dans l'exécution de ses fonctions, s'il était démontré qu'il était impossible de faire témoigner le déclarant et que la déclaration extrajudiciaire présentait des garanties de fiabilité."29
[81]  Doris, l'auteure du rapport de notre exemple, n'est pas disponible pour témoigner et être contre-interrogée sur les faits rapportés dans son rapport. Est-ce que le rapport lui-même est admissible sous l'exception qui porte sur les dossiers d'entreprises?

[82]  En autant que Doris a rédigé son rapport dans l'exécution de ses fonctions pour son employeur dans le cours normal des opérations de ce dernier et qu'elle demeure introuvable, son rapport sera admissible si par ailleurs le document numérique présente des garanties suffisantes de fiabilité. La question de savoir si le document numérique est un écrit ne se pose pas de façon pointue car l'exception ne porte pas sur l'aspect documentaire de la preuve mais bien sur son aspect testimonial. Pourvu qu'il soit possible de reconstituer la déclaration antérieure du témoin qui s'avère non disponible et pourvu que cette déclaration soit par ailleurs admissible par application de l'exception, la preuve sera admise. Nous verrons lors de la discussion des documents numériques sous la Loi sur la preuve au Canada que les tribunaux acceptent d'admettre le document numérique sous l'exception des dossiers d'entreprises sans vraiment s'interroger sur la question de savoir si le document soumis au tribunal est un écrit sur support papier. La seule exigence supplémentaire dans le cas du document numérique est une preuve préalable de la fiabilité du système informatique qui a produit et maintenu le document numérique.

[83]  Dès que l'admissibilité du document numérique franchit le seuil de la règle sur le ouï-dire, s'élève l'obstacle de la règle de la meilleure preuve. Cette fois-ci le plaideur fait face à un obstacle qui est propre au document numérique. Nous avons déjà exploré la question du document numérique face à la règle de la meilleure preuve30 et le raisonnement sera le même pour la preuve du fait matériel que celui pour la preuve de l'acte juridique. Il est donc inutile de s'attarder davantage sur cette question. 

[84]  L'inscription informatisée sous le Code civil du Québec

[85]  Notre nouveau Code civil entré en vigueur le 1er janvier 1994 traite tout particulièrement de la preuve des inscriptions informatisées. Il s'agit d'une petite suite d'articles qui ont déjà fait couler beaucoup d'encre chez les commentateurs, même si aucune jurisprudence n'est venu jeter de lumière sur eux. Il convient de les reproduire intégralement:

[86]"2837 C.c.Q.

Lorsque les données d'un acte juridique sont inscrites sur support informatique, le document reproduisant ces données fait preuve du contenu de l'acte, s'il est intelligible et s'il présente des garanties suffisamment sérieuses pour qu'on puisse s'y fier.

Pour apprécier la qualité du document, le tribunal doit tenir compte des circonstances dans lesquelles les données ont été inscrites et le document reproduit.

2838 C.c.Q.

L'inscription des données d'un acte juridique sur support informatique est présumée présenter des garanties suffisamment sérieuses pour qu'on puisse s'y fier lorsqu'elle est effectuée de façon systématique et sans lacune, et que les données inscrites sont protégées contre les altérations. Une telle présomption existe en faveur des tiers du seul fait que l'inscription a été effectuée par une entreprise.

2839 C.c.Q.

Le document reproduisant les données d'un acte juridique inscrites sur support informatique peut être contredit par tous moyens."

[87]  La première chose à remarquer à la lecture de cette petite suite d'articles c'est que ces articles ne trouvent application que dans le cas de l'acte juridique inscrit dans un document numérique. Dans un deuxième temps, force est de constater que ces articles ne font pas du document numérique un écrit au sens de la loi. L'article 2837 ne fait qu'admettre en preuve l'écrit "reproduisant ces données". Nous devons nous poser dès lors la question de savoir si cet article a pour effet d'écarter le genre d'arguments élaborés ci- dessus en faveur du document numérique à titre d'écrit au sens de la loi.

[88]  Le législateur, en adoptant le Code civil du Québec, a choisi de ne pas retenir l'article 17 de l'ancien code qui traitait des questions d'interprétation. De ce fait, le Code civil ne contient plus de disposition définissant l'"écrit". Toutefois, cette même définition demeure en vigueur sous l'empire de la Loi d'interprétation, L.R.Q., c. I-16, à l'alinéa 21 de l'article 61:

[89]  "21. Les mots écritures, écrits et autres, ayant la même signification, comprennent ce qui est imprimé, peint, gravé, lithographié, ou autrement tracé ou copié." [italiques de l'auteur]
[90]  Nous verrons effectivement ci-dessous que les schémas des articles 2837 à 2839 écartent à toutes fins pratiques l'argument en faveur du document numérique en tant qu'écrit. Il est vrai qu'en aménageant un schéma traitant des inscriptions informatisées, ces articles ont su éliminer certains des doutes qui auraient autrement pu planer sur l'admissibilité des documents numériques, mais l'encadrement est tel que le prix payé pour éliminer ces doutes était peut-être trop élevé. Nous verrons en effet que ces articles n'instaurent pas un régime de preuve pour les documents qui est neutre quant au support sur lequel le document s'inscrit. Aux termes de ces articles, l'inscription d'un acte juridique dans un document numérique ne donne pas le même résultat en matière de preuve que l'inscription du même acte juridique comportant les mêmes caractéristiques sur un support papier.31

[91]  Actes juridiques

[92]  Dans notre exemple, le message d'Andrée est à l'origine un document numérique et n'a pas d'antécédent sur papier. Ceci évite un premier obstacle, car les auteurs ne sont pas unanimes sur la question de savoir si un acte juridique qui est constaté, dans un premier temps sur support papier pour ensuite être repris dans un document numérique, est admissible en preuve sous l'article 2837.32

[93]  Admissibilité

[94]  Afin de pouvoir admettre en preuve l'écrit qui reproduit le message de notre exemple, le plaideur devra faire la preuve que celui-ci présente des garanties suffisamment sérieuses pour que le tribunal puisse s'y fier. Pour apprécier ce caractère de fiabilité du document, le tribunal devra tenir compte des circonstances dans lesquelles le message a été rédigé et le document reproduit. Cette preuve, tout comme celle décrite antérieurement dans la dicussion du régime de preuve des documents numériques sous l'ancien code,33 fera de chaque cause un cas d'espèce. Contrairement à l'ancien droit, dans le cas de notre exemple le plaideur bénéficiera, aux termes du nouveau Code civil, de la présomption de l'article 2838 et il y a donc une présomption d'admissibilité en faveur de notre message. Ce sera donc à celui qui s'oppose à sa production (dans notre cas le manufacturier Acme) de faire la preuve que le système informatique qui a servi à la rédaction et à la transmission du message comporte des lacunes qui compromettent la fiabilité du message. 

[95]  Valeur probante

[96]  Rappelons-nous que le message de notre exemple comporte l'indication suivante: "(s) Andrée, Directrice des ventes - Acme". Nous avons vu que l'ancien Code civil n'excluait pas nécessairement la possibilité qu'un tribunal puisse conclure que cette inscription constitue une signature valable au sens de la loi, l'ancien Code civil étant silencieux sur la question.34 Le législateur, étant conscient des défis posés par les documents numériques, a adopté une nouvelle disposition sur la signature que le législateur voit comme étant plus souple:35

[97]  "2827 C.c.Q.

La signature consiste dans l'apposition qu'une personne fait sur un acte de son nom ou d'une marque qui lui est personnelle et qu'elle utilise de façon courante, pour manifester son consentement."

[98]  Encore ici nous constatons que les auteurs sont partagés sur l'effet de cette innovation législative. Certains auteurs se rangent du côté du ministre de la Justice pour voir dans cet article un assouplissement du régime de la signature anciennement en vigueur qui favorise les signatures sur les documents numériques.36 Jean-Claude Royer par contre trouve que cet article vient restreindre une souplesse qui existait déjà dans la loi:
[99]  "L'O.R.C.C. a proposé une définition large mais imprécise de la signature, Celle-ci est définie par l'Office comme l'apposition par une personne de son nom ou de toute marque par laquelle elle manifeste son consentement. Le législateur québécois n'a pas suivi cette recommandation de l'O.R.C.C. L'Article 2827 du Code civil du Québec définit la signature comme suit:

Le législateur québécois a préféré donner une définition plus restrictive de la signature. Il est douteux que la signature au moyen d'une simple croix soit encore admise. Une croix n'est pas une marque personnelle distinctive, même lorsqu'elle est utilisée de façon courante."37

[100]  Résoudre ce débat semble toutefois quelque peu inutile car l'intérêt de la signature sous le Code civil du Québec est seulement de rehausser la valeur probante du document sur lequel elle est apposée. Tandis que sous l'ancien code la signature de l'écrit détermine son admissibilité dans l'exemple qui nous occupe,38 le Code civil du Québec ne fait qu'établir en faveur de l'écrit signé une meilleure valeur probante. Il en résulte que l'écrit signé est tenu pour reconnu à l'encontre de la personne qui paraît l'avoir signé39 et que l'acte juridique constaté dans cet écrit fait preuve de son contenu.40 Dans la mesure où le document reproduisant le document numérique est tenu pour admissible, il est réputé faire preuve de son contenu, qu'il soit ou non signé.41 Le seul intérêt pour la signature apposée sur le document numérique est dès lors de tenir le document numérique comme reconnu contre son auteur.42

[101]  Mais même cela semble être une hypothèse que l'on doit peut- être écarter. Car les auteurs, quoique encore une fois loin d'être unanimes sur le sujet,43 semblent de l'avis que le document numérique n'étant pas lui-même un écrit, il ne saurait constituer un acte sous seing privé au sens du Code civil (encore une fois, nous lisons Jean-Claude Royer):

[102]  "415 - Preuve contraire - Comme les autres écrits prévus aux articles 2831 à 2834 du Code civil du Québec, le document reproduisant les données d'un acte juridique sur support informatique peut être contredit par tous les moyens. Cette règle s'applique, même si l'inscription informatisée a été effectuée au moyen d'une carte magnétique permettant d'identifier son auteur. Il est vrai que la signature électronique peut être comprise dans la définition de la signature énoncée à l'article 2827 C.c.Q. Cependant, le document n'est pas un acte sous seing privé, il est exclusivement réglementé par les articles 2837 à 2839 du Code civil du Québec."44

[103]  En effet, l'article 2839 C.c.Q. vient établir, dans le cas du document numérique, une règle qui, à toutes fins pratiques, relègue le document numérique au dernier rang de la preuve comme document ayant la plus faible valeur possible, car le document reproduisant l'inscription informatisée peut se contredire par tous les moyens.45

[104]  Ceci écarte donc le principe élémentaire en fait de preuve écrite à l'effet que la preuve testimoniale n'est pas admissible pour contredire les termes de l'écrit.46 Andrée pourrait donc en principe témoigner que le message envoyé n'était qu'une simulation destinée à encourager l'achat des véhicules par Automobiles Crésus et que son intention n'était pas de faire une offre à Automobiles Beauchemin qui lierait son employeur Acme. Cette preuve serait probablement inadmissible aux termes de l'Article 2863 C.c.Q. si son message avait été rédigé sous forme d'une lettre et envoyé à Benoît par la poste.47

[105]  Il en ressort que le régime de preuve du document numérique, en ce qui a trait aux actes juridiques aux termes du Code civil du Québec, est fort probablement moins propice à la dématérialisation des transactions que ne l'était le Code civil du Bas-Canada. D'ailleurs, ce régime de preuve n'est pas conforme aux recommandations de la CNUDCI en pareille matière, recommandations que nous verrons ci-dessous.48

[106]  Il va de soi que la saine administration de la justice demande, dans des situations particulières, de permettre la preuve pour contredire les termes d'un écrit. Il en est ainsi lorsque le but est d'éviter ou de réprimer les abus.49 Mais l'auteur soumet que permettre une telle preuve comme règle générale de l'administration de la preuve pour un genre d'écrit qui prend de plus en plus d'importance dans notre société, comme c'est le cas du document numérique, n'est foncièrement pas une politique destinée à favoriser la saine administration de la justice. 

[107]  Faits matériels

[108]  Le Code civil du Québec, tout comme son prédécesseur le Code civil du Bas-Canada , ne contient pas de dispositions précises sur la preuve de faits matériels par la voie de documents numériques. Le fait matériel demeure prouvable par tous les moyens.50 La situation demeure donc essentiellement inchangée par rapport à celle qui règne aux termes de l'ancien Code civil, si ce n'est que par rapport à la mise- à-jour des règles sur l'admissibilité des dossiers d'entreprise et de la règle de la meilleure preuve. 

[109]  Admissibilité

[110]  Souvenons-nous que dans notre exemple Doris est introuvable et que tout ce qui reste est l'inscription dans la base de données de la compagnie de chemin de fer de son rapport constatant les dommages au véhicule. Tout comme sous l'ancien Code civil, le plaideur se heurte en premier lieu à la règle sur le ouï-dire. La règle et ses exceptions demeurent essentiellement inchangées quoique maintenant consignées dans le Code civil dans des dispositions précises.51

[111]  C'est l'article 2870 C.c.Q. qui codifie l'exception qui rend admissible les écrits pour prouver les faits matériels:

[112]  "2870 C.c.Q.

La déclaration faite par une personne qui ne comparaît pas comme témoin, sur des faits au sujet desquels elle aurait pu légalement déposer, peut être admise à titre de témoignage, pourvu que, sur demande et après qu'avis en ait été donné à la partie adverse, le tribunal l'autorise.

Celui-ci doit cependant s'assurer qu'il est impossible d'obtenir la comparution du déclarant comme témoin, ou déraisonnable de l'exiger, et que les circonstances entourant la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s'y fier.

Sont présumés présenter ces garanties, notamment, les documents établis dans le cours des activités d'une entreprise et les documents insérés dans un registre dont la tenue est exigée par la loi, de même que les déclarations spontanées et contemporaines de la survenance des faits."

[113]  Encore une fois nous revenons à ce critère de "garanties suffisamment sérieuses" que nous avons déjà vu à plusieures reprises. Dans le cas de notre exemple, dans la mesure où Doris avait pour mission, dans le cours ordinaire des activités de son emploi, de constater l'état des véhicules remis aux fins de transport, le document numérique bénéficierait d'une présomption d'admissibilité aux termes de l'article 2870 C.c.Q.

[114]  Il est intéressant de noter que les auteurs ne s'attardent pas outre mesure sur la question de savoir si le document numérique est un "écrit" au sens de l'article 2832 C.c.Q. ou un "document" au sens de l'article 2870 C.c.Q. Jean-Claude Royer écrit:

[115]  "Une inscription informatisée rapportant des faits matériels sera recevable en preuve dans les circonstances où une déclaration extra-judiciaire écrite est admissible."52
[116]  Il s'agit cependant d'une affirmation qui n'est pas fondée sur une argumentation particulière et cet auteur n'invoque rien de particulier pour soutenir cette thèse. C'est ici que nous nous heurtons très naturellement, encore une fois, à la règle de la meilleure preuve. Mes Trudel, Lefebvre et Parisien prennent pour leur part une approche plus analytique et abordent la question de la nature du document numérique sous l'angle de la règle de la meilleure preuve:
[117]"Le second obstacle à l'admissibilité en preuve d'un document informatisé pour prouver un fait matériel est la règle de la meilleure preuve. En vertu de cette règle, une preuve doit, par sa nature, constituer la meilleure preuve susceptible d'être offerte. La règle de la meilleure preuve suppose généralement dans le cas des écrits que ceux-ci soient présentés dans leur version originale. Dans le contexte de l'EDI, le problème que soulève cette règle provient du fait qu'il est possible de soutenir que l'original en question est représenté par les données contenues dans l'ordinateur sous forme magnétique ou électronique, c'est-à-dire dans un langage incompréhensible pour le commun des mortels. Le listage ou l'imprimé sur support-papier ne constituerait qu'une transcription ou une copie normalement irrecevable en preuve."53
[118]  L'argument en faveur du document numérique, en tant qu'écrit de son propre chef, n'est pas abordé. L'argument alternatif employé par ces auteurs pour contourner la difficulté est de passer par l'article 2860 C.c.Q. qui permet la preuve par tous les moyens lorsqu'il est impossible de produire l'original. Leur conclusion est à l'effet que l'imprimé, malgré que ce soit une copie, soit la meilleure preuve dont le cas est susceptible. C'est donc une façon de satisfaire à la règle de la meilleure preuve sans aborder directement la nature du document numérique lui-même. C'est essentiellement la même approche que celle adoptée en France sous le Code civil français, approche qui d'ailleurs fait l'objet de critiques.54

[119]  Mais même si le plaideur désirait faire un argument à l'effet que le document numérique dans sa guise native est en fait un "écrit" au sens de la loi, argument qui selon nous est recevable sous l'empire de l'ancien Code civil,55 est-ce que l'adoption des articles 2837 C.c.Q. et suivants laisse ouverte cette avenue? Nous devrons attendre que nos tribunaux se prononcent sur la question. Toutefois, il semble que l'article 61 de la Loi d'interprétation demeure suffisamment large pour permettre de voir le document numérique comme un écrit au sens de la loi, au moins pour les fins des articles 2832 et 2870 C.c.Q. et la preuve du fait matériel qui serait constatée dans un document numérique. 

[120]  Valeur probante

[121]  Le document numérique, s'il est admissible aux termes de l'article 2870 C.c.Q., aura la même force qu'un aveu extra-judiciaire si invoqué à l'encontre de son auteur ou, comme dans le cas de notre exemple, lorsque invoqué à l'encontre d'un tiers, aura la même force probante qu'un témoignage au même effet.56 Nous savons que la force probante du témoignage est laissée à l'appréciation du tribunal.57

[122]  Les documents numériques et les dispositions statutaires particulières

[123]  Certaines lois provinciales

[124]  Nous avons vu que le législateur québécois n'est pas disposé à reposer énormément de confiance dans les documents numériques lorsque ces documents sont générés par les justiciables.58 Il en est autrement lorsque c'est le gouvernment lui-même qui exploite le système informatique. Nous voyons alors un régime tout à fait différent pour le document numérique, qui se voit accorder une admissibilité, et une force probante qui se rapprochent beaucoup plus de l'écrit sur support papier:

[125]  "Article 83.19

Preuve du contenu.

Une transcription écrite et intelligible des données que la Société a emmagasinées par ordinateur ou sur tout autre support magnétique constitue un document de la Société et fait preuve de son contenu lorsqu'elle est certifiée conforme par un fonctionnaire autorisé conformément à l'article 15 de la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec (chapitre S-11.011)."59

[126]  Des dispositions semblables ou similaires se retrouvent dans plusieurs lois en vigueur au Québec.60 Il y a lieu de s'interroger sur la justification de la divergence importante dans le traitement juridique entre le document numérique dans les mains du gouvernement et le document numérique dans les mains du justiciable. Ils se servent quand même des mêmes outils informatiques quoique le secteur privé a tendance à suivre de plus près l'évolution de la technologie. Ne serait-ce pas là un facteur qui inciterait le législateur à offrir au justiciable un traitement au moins égal à celui qu'il se réserve pour lui-même? 

[127]  Le Code de procédure pénale

[128]  Au moment d'écrire ces lignes, la loi québécoise qui vient le plus proche d'adopter un régime qui permet au document numérique de jouir du même traitement juridique que le document sur support papier est le Code de procédure pénale61 en raison des amendements adoptés en 1995 destinés à permettre la dématérialisation des constats d'infraction et de la procédure pénale. La réglementation nécessaire pour encadrer cette dématérialisation n'existe pour le moment que comme projet et la dématérialisation n'est donc pas en vigueur. Une fois en vigueur, l'effet de ces dispositions sera de donner lieu à une équivalence tout à fait transparente entre le constat d'infraction émis sous sa guise d'impression sur papier et celui émis sous une guise de document numérique. Le seul autre exemple en Amérique d'une telle loi sectorielle permettant la dématérialisation avec équivalence complète est celui des règlements d'application déposés en mars 1997 sous l'empire de la Food, Drug and Cosmetic Act des États-Unis.62

[129]  La Loi sur la preuve au fédéral

[130]  Juridiction, domaines d'application et modalités

[131]  Lorsque la question de faire la preuve du document numérique est soulevée dans une instance civile qui relève de la juridiction du Parlement fédéral devant un tribunal siégeant au Québec, la loi qui s'applique est la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. 1985, c. C-5, L.R. c. E-10. Cette loi codifie en partie la loi sur la preuve telle qu'elle s'applique dans de telles instances. A défaut d'une disposition de cette loi, ce sont les dispositions du Code civil du Québec qui s'appliquent à titre supplétif.63

[132]  Jurisprudence sur l'admissibilité des inscriptions informatisées

[133]  La preuve des écrits est traitée par un bon nombre de dispositions de la loi, et la jurisprudence sur la question des documents numériques, quoique plus abondante que la jurisprudence inexistante en droit civil, demeure minime. Le document numérique est généralement reconnu comme étant admissible là où la Loi sur la preuve au Canada mentionne l'admissibilité d'écrits provenant de "registres". Il a donc été jugé qu'un ordinateur n'est pas un "livre" pour les fins de l'article 26 de cette loi.64 Par contre le document numérique a été jugé admissible dans le cadre de l'article 29 de la loi qui traite de l'admissibilité de renseignements tirés des registres d'institutions financières:

[134]  "29. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, une copie de toute inscription dans un livre ou registre tenu dans une institution financière fait foi dans toutes procédures judiciaires, jusqu'à preuve contraire, de cette inscription, ainsi que des affaires, opérations et comptes y inscrits.

Admissibilité en preuve

(2) Une copie d'une inscription dans ce livre ou registre n'est pas admise en preuve sous le régime du présent article à moins qu'il n'ait préalablement été établi que le livre ou registre était, lors de l'inscription, l'un des livres ou registres ordinaires de l'institution financière, que l'inscription a été effectuée dans le cours ordinaire des affaires, que le livre ou registre est sous la garde ou la surveillance de l'institution financière, et que cette copie en est une copie conforme. Cette preuve peut être fournie par le gérant ou par le comptable de l'institution financière ou par tout employé de l'institution qui connaît le contenu du livre ou du registre et peut être donnée de vive voix ou par affidavit devant un commissaire ou une autre personne autorisée à recevoir les affidavits."

[135]  C'est dans l'arrêt R. c. McMullen65 que la Cour d'Appel de l'Ontario a statué en faveur de l'admissibilité d'imprimés reproduisant des documents numériques. Le juge Morden a souscrit à l'opinion du juge Linden qui, siégeant en révision de la décision du juge au mérite, a permis d'admettre la preuve des soldes du compte de banque de l'accusé tirés du système informatique de la Banque de Nouvelle-Écosse. Voici le raisonnement qui a été retenu:
[136]  "As far as the possible meanings are concerned there is in the range of dictionary definitions of each word a suitable one which, if used, would make the language applicable to computer print-outs. Possibly the most troublesome is "copy" (from the vantage point of "copy of what original record?") but one of the possible meanings of this word is "transcript", which clearly may involve the copying out in ordinary writing of data recorded in a different form. That is, the word does not necessarily require that the copy be a duplicate, in form, of the original. Thus there is no deficiency in the language itself.

Neither does the context of s. 29 itself dictate that the "record" be confined to a visual, written one. It may be that some of the provisions therein, such as s-ss. (6) and (7) would be difficult or impossible to apply with respect to those bank records which are contained in computer memories but this in itself does not require the attribution of a restricted meaning to "record" wherever it appears in s. 29.

As noted by Linden, J., the basic purpose of s.29 is to avoid the inconvenience to financial institutions and their customers of original bank records being removed from banks for production in legal proceedings and to facilitate the proof of matters entered in bank records. The fact that computerized bank records could not have been within the contemplation of Parliament when s. 29 was first enacted in 1927 (see 1927 (Can.), c. 11, s.2, and also, the Bankers' Books Evidence Act, 1879 (U.K.), c.11) is no reason to deny the provision's application to computer records today if such evidence reasonably comes within its language and purpose."66

[137]  Tout en trouvant l'imprimé reproduisant le document numérique admissible, le tribunal a pris soin de tenir compte des particularités du document numérique et a ainsi statué que l'admissibilité du document numérique dépend de l'établissement d'une preuve préalable qui démontre la fiabilité du document numérique:
[138]  "I accept that the demonstration of reliability of computer evidence is a more complex process than proving the reliability of written records. I further accept that as a matter of principle a court should carefully scrutinize the foundation put before it to support a finding of reliability, as a condition of admissibility (see McCormick's Handbook on the Law of Evidence, 2nd ed. (1972), p. 734), and that the admission procedures in s. 30 are more fine-tuned than that in s. 29. However, this does not mean that s. 29 (2) is not adequate to the task. The four conditions precedent provided for therein, the last one being that the copy of the entry offered in evidence is a true copy of what is in the records, have to be proven to the satisfaction of the trial Judge. The nature and quality of the evidence put before the Court has to reflect the facts of the complete record keeping process - in the case of computer records, the procedures and processes relating to the input of entries, storage of information and its retrieval and presentation."67
[139]  L'article général sur l'admissibilité de documents se trouvant parmi les dossiers d'entreprises est l'article 30. Cet article est rédigé en termes similaires à ceux de l'article 29 que nous venons de voir, mais il comporte par surcroît une définition statutaire du mot anglais "record" qui pour les fins de l'article 30 est traduit par le mot français "pièce":
[140]  "30. (1) Lorsqu'une preuve orale concernant une chose serait admissible dans une procédure judiciaire, une pièce établie dans le cours ordinaire des affaires et qui contient des renseignements sur cette chose est, en vertu du présent article, admissible en preuve dans la procédure judiciaire sur production de la pièce.

[...]

(12) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

pièce "record"

[...]

pièce Sont assimilés à une pièce l'ensemble ou tout fragment d'un livre, d'un document, d'un écrit, d'une fiche, d'une carte, d'un ruban ou d'une autre chose sur ou dans lesquels des renseignements sont écrits, enregistrés, conservés ou reproduits, et, sauf pour l'application des paragraphes (3) et (4), toute copie ou transcription admise en preuve en vertu du présent article en conformité avec le paragraphe (3) ou (4).

L.R. (1985), ch. C-5, art. 30; 1994, ch. 44, art. 91."

[141]  Les tribunaux n'ont eu aucune difficulté à conclure en faveur de l'admissibilité des documents numériques sous l'empire de l'article 30 de la Loi sur la preuve au Canada étant donné les termes larges et permissifs du paragraphe 30 (12).68 Il est à remarquer que les termes de la définition de "pièce" dans l'article 30 de la loi ne sont pas tellement différents de la définition du mot "écrit" dans l'article 17 du Code civil du Bas-Canada ou de l'article 61 de la Loi d'interprétation du Québec, ce qui rend encore plus plausible l'interprétation de ces dispositions en faveur du document numérique comme un écrit.

[142]  Nous voyons donc que, malgré un régime de preuve sensiblement différent en ce sens que la Loi sur la preuve au Canada codifie la common law britannique, telle qu'en vigueur au Canada, le processus et le raisonnement juridique qui mènent à l'admissibilité des documents numériques est essentiellement le même. Le manque d'originalité, qui est de l'essence même du document numérique, étant remplacé par la notion de fiabilité su système informatique.

[143]  Si nous appliquons la Loi sur la preuve au Canada, tant au message envoyé par Andrée qu'au rapport rédigé par Doris, nous sommes en mesure de constater qu'ils seraient tous deux admissibles aux termes de l'article 30 de la loi, sous réserve évidemment d'une preuve établissant la fiabilité du système informatique dans chaque cas. Car dans la mesure où la fiabilité du système informatique n'est pas démontrée à la satisfaction du tribunal, la preuve du document numérique ne sera pas admise.69

[144]  La situation juridique à l'extérieur du Québec

[145]  L'initiative de l'Organisation des Nations-Unies

[146]  Avant de jeter un regard vers la situation du document numérique dans les principales juridictions occidentales il serait bon de se pencher sur le travail de normalisation entrepris par l'Organisation des Nations-Unies par le biais de la Commission des Nations-Unies pour le droit commercial international ("CNUDCI"). Celle-ci a adopté, lors de sa vingt et unième session se terminant en juin 1996, le Projet de loi type sur le commerce électronique qui se veut un modèle pour favoriser l'implantation chez les états-membres de l'ONU des lois favorisant la preuve de documents numériques (ci-après la "Loi modèle"). 

[147]  Loi modèle de la CNUDCI

[148]  La Loi modèle est divisée en deux parties. La première partie traitant du commerce électronique en général et la deuxième partie traitant de documents numériques dans le transport de marchandises. La partie I est subdivisée en 15 articles répartis en trois chapitres traitant a) du champ d'application et de l'interprétation, b) de l'application des règles de droit aux documents numériques et c) de la transmission des documents numériques. Pour les fins du présent ouvrage, ce sont les cinq articles du deuxième chapitre qui nous intéressent.

[149]  La Loi modèle établit une série de règles destinées à assurer que le document numérique se voit accorder un traitement juridique qui n'est pas inférieur au traitement accordé au même genre de document inscrit sur support papier. L'article 5 prévoit que des informations consignées dans un document numérique ne se verront pas nier leur effet juridique, leur validité ou leur force exécutoire seulement parce qu'il s'agit d'un document numérique. L'article 6 prévoit que si la loi exige un écrit, cette exigence est satisfaite par le document numérique pourvu que le renseignement qu'il renferme soit accessible aux fins de référence.

[150]  L'article 7 de la Loi modèle traite de la signature. Cet article prévoit que lorsque la loi exige une signature, cette exigence est satisfaite par le document numérique si le document numérique utilise une méthode pour indiquer dans le document l'approbation du signataire et que la méthode utilisée est fiable dans les circonstances. L'article 8 traite de la règle de la meilleure preuve. Cet article prévoit que lorsque la loi exige la production d'un original, cette exigence est satisfaite par un document numérique dans la mesure où il existe des garanties fiables de l'intégrité du document numérique à compter de sa création et que le document numérique peut être consulté par son destinataire. Le critère d'intégrité est évalué selon que le document numérique demeure inchangé, sous réserve de modifications provenant soit d'endossements ou de la méthode de transmission. Le degré de l'assurance d'intégrité requis est évalué selon les circonstances de chaque cas.

[151]  L'article 9 de la Loi modèle traite de l'admissibilité et de la force probante du document numérique lorsque offert en preuve dans une instance judiciaire. Cet article prévoit que le message numérique est admissible s'il constitue la meilleure preuve dans les circonstances et qu'il reçoit la force probante voulue en tenant compte des circonstances dans lesquelles le document numérique a été généré, conservé et transmis. L'article 10 prévoit que lorsque la loi exige la conservation de documents, de registres ou de renseignements, cette exigence est satisfaite par le document numérique si celui-ci est accessible aux fins de référence ultérieure et qu'il est conservé dans la forme dans laquelle il a été généré, transmis ou reçu, selon le cas. Lorsque le document numérique est un message, il doit comprendre l'information permettant d'identifier son origine et sa destination et la date et l'heure d'envoi ou de réception, le cas échéant.

[152]  Il y a lieu enfin de mentionner l'article 11 du chapitre III de la Loi modèle qui traite de la formation des contrats par voie de documents numériques. Cette disposition édicte tout simplement que le document numérique peut valoir pour exprimer une offre et une acceptation. Lorsqu'un ou plusieurs documents numériques sont utilisés dans la formation d'un contrat, le contrat qui en résulte n'est pas pour ce motif invalide ou inexécutoire.

[153]  La Loi modèle donne lieu à un environnement juridique qui met le document numérique sur un pied d'égalité avec le même document sur support papier, dans la mesure où la fiabilité convenable du système informatique, qui est appropriée dans les circonstances, soit démontrée à la satisfaction du tribunal.

[154]  Si la Loi modèle était en vigueur dans la juridiction dans laquelle le message d'Andrée et le rapport de Doris étaient offerts en preuve, il ne peut y avoir aucun doute qu'il seraient tenus pour admissibles et qu'il recevraient la force probante voulue.

[155]  Nous avons vu comment, tant sous le droit civil québécois que sous la Loi sur la preuve au Canada et sous la Loi modèle, le thème de la fiabilité du système vient se substituer tour à tour à la notion d'originalité qui, jusqu'à présent, a été la pierre angulaire de la preuve documentaire. Voyons si ce thème se dégage également dans les autres juridictions. 

[156]  La situation ailleurs au Canada

[157]  La preuve du fait matériel

[158]  La loi sur la preuve dans les provinces canadiennes autres que le Québec est le droit coutumier connu comme le common law, tel que modifié de temps à autre par l'adoption de lois particulières, dont le but est de codifier le common law, souvent dans le but de la réforme du droit. Les grands principes directeurs qui sous-tendent la preuve des écrits en common law sont la règle de la meilleure preuve et la prohibition du ouï-dire.

[159]  Le statut du document numérique et la question de savoir s'il est admissible en tant qu'écrit a fait l'objet de plus de jurisprudence, et a fait couler moins d'encre chez les auteurs en common law que dans les juridictions de droit civil. La raison réside peut-être dans la perception, à tort ou à raison, que le common law a fait preuve au fil du temps d'une certaine souplesse et ainsi d'une capacité d'adaptation aux technologies en développement. Quoi qu'il en soit, nous verrons que les tribunaux ont accepté l'admissibilité du document numérique en même temps qu'ils tempéraient de plus en plus la portée des règles de preuve qui freinent l'admissibilité des éléments de preuve en faveur de règles qui portent plus sur l'appréciation du poids de la preuve.70 Le passage suivant de The law of evidence in Canada présente bien cette réalité du common law moderne:

[160]  "A document has been traditionally defined as any written thing capable of being made evidence, no matter on what material it may be inscribed. Some statutes have broadened the meaning of the written word: " 'writing', 'written', or terms of similar import includes words printed, typewritten, painted, engraved, lithographed, photographed or represented or reproduced by any mode of representing or reproducing words in visible form".71 Statutory provisions, such as s. 30 (12) of the Canada Evidence Act, broadly define business records to include modern forms of storing information:

[citation omise - voir ci-dessus au paragraphe 140]

Rules of practice, such as the British Columbia Rules of Court, have given an expanded definition of what constitutes a document:

'document' has an extended meaning and includes a photograph, film, recording of sound, any records of a permanent or semi-permanent character and any information recorded or stored by means of any device.
The legislative and judicial trend is to broadly define documents to include modern methods of communicating and storing information. Tape recordings, videotapes, microfiche and computer records72 have been admitted as documentatry evidence in civil and criminal proceedings. In its broadest sense, a document could be anything, other than testimony, that can be perceived and presented in a courtoom."73
[161]  Un exemple de cette approche qui favorise l'admissibilité du document numérique se trouve dans l'arrêt Tecoglas c. Domglas74 qui a admis des imprimés de documents numériques sous l'empire de l'article 35 de la Loi sur la preuve75 de l'Ontario qui se lit ainsi:
[162]  "35. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

document S'entend d'un renseignement enregistré ou conservé par quelque moyen que ce soit. (record)

entreprise S'entend de tous les types d'entreprise, de profession, de métier ou de travail, d'exploitation ou d'activité aussi bien à but lucratif que sans but lucratif. (business)

Admissibilité d'un document d'une entreprise

(2) Les écrits ou documents relatifs à un acte, une opération, une circonstance ou un événement sont admissibles comme preuve de cet acte, opération, circonstance ou événement s'ils ont été établis dans le cours ordinaire des affaires d'une entreprise et si cette entreprise les établissait ordinairement, soit à l'époque où l'acte, l'opération, la circonstance ou l'événement se sont produits, soit dans un délai raisonnable après ceux-ci.

Avis et production

(3) Le paragraphe (2) ne s'applique que si la partie qui présente l'écrit ou le document donne, à toutes les autres parties à l'action, un préavis d'au moins sept jours de son intention de les présenter. Toute partie à l'action a le droit d'obtenir de la personne qui en a la possession la production de l'écrit ou du document, afin de les examiner, dans les cinq jours de la date d'un avis à cet effet.

Circonstances entourant l'établissement du document

(4) Les circonstances dans lesquelles l'écrit ou le document ont été établis, y compris l'absence de connaissance directe des faits de la part de leur auteur, peuvent être exposées afin de diminuer la force probante de l'écrit ou du document sans toutefois porter atteinte à leur admissibilité

Absence d'incidence sur les règles antérieures relatives à l'admissibilité et aux documents privilégiés

(5) Le présent article n'a aucune incidence sur l'admissibilité d'une preuve qui serait admissible indépendamment du présent article, ni ne rend admissible un document ou un écrit privilégié.

L.R.O. 1990, chap. E.23, art. 35."76

[163]  Il ressort de ce qui précède que la situation du document numérique, comme élément de preuve dans les juridictions de common law au Canada, est loin d'être désespérée. On oserait même conclure que les lois actuelles et la jurisprudence de plus en plus abondante ne semblent guère poser de problèmes pour le document numérique. Néanmoins, la loi de la preuve, dans ses rapports avec les nouvelles technologies, fait l'objet d'une étude menée par la Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada (ci-après la "Conférence"). La Conférence a publié en mars 1997 un document de consultation concernant un projet de loi uniforme sur la preuve des documents numériques. Ce document de consultation est la suite de plusieurs années de travail par la Conférence et de plusieurs mémoires de recherche sur la question.77

[164]  La Conférence estime que, malgré le fait qu'il n'existe pas d'obstacles majeurs élevés contre la preuve des documents numériques pour le moment, il n'en demeure pas moins que les documents numériques soulèvent des difficultés à trois égards: à l'égard de i) l'authentification, ii) à l'égard de la règle de la meilleure preuve, et iii) à l'égard de la règle sur le ouï-dire. La Conférence estime (à raison selon l'auteur) que la règle sur le ouï-dire s'applique de la même façon, tant à l'égard de documents numériques qu'à l'égard de documents sur support papier, et qu'en conséquence le besoin de réforme ne se fait pas sentir sur ce plan.78 En ce qui concerne l'authentification de ce document, la Conférence estime que l'authentification préalable requise pour permettre l'admissibilité du document numérique ne devrait pas se distinguer de l'approche adoptée pour les documents traditionnels sur support papier.79

[165]  La Conférence croit donc que le noeud de la problématique pour les documents numériques se situe au niveau de la règle de la meilleure preuve. Ce qui est clair pour la Conférence c'est que la notion de chercher à admettre un document original, lorsque se présente un document numérique, est un effort futile voué à l'échec. La Conférence conclut qu'en matière de document numérique, la règle de la meilleure preuve devrait être satisfaite en substituant comme témoin principal de la fiabilité du document, la caractéristique de l'originalité essentielle du document sur support papier par la caractéristique de la fiabilité du système informatique dans lequel le document numérique existe.80

[166]  En ce qui concerne l'administration de cette règle sur la fiabilité du système, la Conférence envisage deux choix possibles: i) le devoir pour le plaideur d'établir la fiabilité du système informatique comme condition à l'admissibilité du document numérique en preuve, ou ii) une présomption d'admissibilité fondée sur le degré de preuve testimoniale qui justifie l'admissibilité de toute preuve documentaire, en laissant au juge du mérite le soin de peser la force probante du document ainsi admis, en fonction de la preuve plus extensive sur la question de fiabilité que les parties pourront apporter.81

[167]  Nous avons vu que le Code civil du Québec a choisi de faire de la fiabilité du système informatique un critère d'admissibilité, tempéré par la présomption favorable en faveur de documents numériques créés dans le cadre des activités d'une entreprise. Pour le moment, cette approche est plus favorable (en raison de la présomption) que l'approche ailleurs au Canada malgré le refus, selon l'auteur injustifié, d'admettre le document numérique comme un écrit ce qui pose des problèmes importants tant pour la force probante des actes juridiques, que par rapport à l'admissibilité de faits matériels, constatés par un document numérique. A l'avenir, la preuve de documents numériques pourrait devenir plus facile ailleurs au Canada si la tendance de la Conférence vers une règle favorisant l'admissibilité, sous réserve de l'évaluation de la force probante, est retenue pour la réforme de la loi sur la preuve. 

[168]  La preuve de l'acte juridique

[169]  En sus des obstacles qui s'élèvent en common law canadien au chapitre de la loi de la preuve proprement dite, il y a le problème d'une loi très ancienne d'origine britannique connue comme le Statute of Frauds. Le Statute of Frauds remonte à 1677 en Angleterre et se voulait, comme son titre l'indique si bien, une loi pour réprimer la fraude. Là où cette loi trouve application, elle exige que le contrat soit constaté par un écrit signé. A défaut, le contrat perd sa force exécutoire.

[170]  Cette loi a été reçue tant au Canada qu'aux États-Unis.82 C'est une loi qui a perdu une grande partie de sa raison-d'être et a elle a été soit abrogée ou remplacée dans plusieurs provinces, dont le Manitoba83 et la Colombie-Britannique et, dans la mesure où elle s'appliquait à la vente de biens meubles, a souvent été remplacée par une disposition du droit de la vente exigeant un contrat écrit signé. 84 Elle demeure en vigueur en Ontario où l'exigence par rapport aux contrats de vente se trouve maintenant dans le Sale of Goods Act.85

[171]  Le problème c'est que cette loi ne définit guère la notion d'écrit ou de signature. Les tribunaux se sont heureusement montrés très libéraux, voire même inventifs, quand il a été question d'interpréter l'exigence de l'écrit signé. Les tribunaux ont donc statué que plusieurs documents disparates (tels chèques, reçus, lettres, etc.) peuvent être interprétés ensemble pour satisfaire à l'exigence de l'écrit.86 En ce qui concerne le besoin de signature, les tribunaux se sont satisfaits de l'apposition de sceaux, d'étampes et d'autres marques qui ne sont certainement pas, à proprement parler, des signatures.87

[172]  Il ne semble y avoir aucune jurisprudence sur la question de savoir si un document numérique, comme le message d'Andrée de notre exemple, serait susceptible de satisfaire à l'exigence d'un écrit signé aux termes de ces lois. Cependant, étant donné la grande flexibilité dont les tribunaux canadiens ont fait preuve par rapport à ces exigences, il y a tout lieu de croire qu'ils seraient favorables au genre d'argument élaboré ci-dessus par rapport à l'exigence de l'écrit signé contenu dans l'article 1235 C.c.B.C.88 D'ailleurs la Loi d'Interprétation de la province d'Ontario, pour ne prendre que cet exemple, contient une définition tout aussi large de l'écrit que celle que nous avons vu dans le cas du Québec:

[173]  "Termes et expressions

29. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à toutes les lois, à moins que le contexte n'exige autrement.

[...]

écrit S'entend notamment de mots représentés ou reproduits sous une forme visible et notamment imprimés, peints, gravés, lithographiés et photographiés. La présente définition s'applique à tout terme de sens analogue. (writing, written)"89

[174]  Aux États-Unis, où de pareilles dispositions sont également en vigueur, malgré qu'il y a également une absence de jurisprudence, les auteurs semblent optimistes sur les chances du document numérique de satisfaire aux exigences. Tant qu'un tribunal ne se sera pas prononcé, un doute devra planer sur le document numérique à cet égard. 

[175]  La situation aux États-Unis

[176]  Comme règle générale, les documents numériques sont admissibles aux termes des diverses lois sur la preuve en vigueur aux États-Unis.90

[177]  La preuve du fait matériel

[178]  La première étape à franchir dans la production du document numérique est d'authentifier le document. L'étape d'authentification, comme c'est le cas d'ailleurs en droit de la preuve dans les juridictions de common law au Canada, s'applique tout autant pour les documents sur support papier. Il s'agit d'établir par témoignage l'origine et l'intégrité du document en question.91 Le témoin qui produit le document numérique n'est pas obligatoirement un expert par rapport au système informatique à la source du document:

[179]  "Authentication of computer-generated evidence has thus far been governed by the principles, rules and statutes that existed before computer usage became widespread. The presumption then was that any documentary evidence would exist on paper and authentication lay in the testimony of the document's author or in verification of a signature. The Federal Rules of Evidence contain several references to types of evidence that may be computer-generated. Rule 901(b) gives examples of how evidence might be authenticated. Especially pertinent to computer-generated evidence are references to a "witness with knowledge", whose testimony is required for admission of evidence, and a "process or system used" for maintenance of the evidence."92
[180]  Une fois l'étape d'authentification du document numérique franchi, le plaideur qui cherche à faire la preuve du rapport de Doris dans notre exemple de la preuve du fait matériel, devra abriter le document numérique sous une exception à la règle sur le ouï-dire. Cette règle peut-être considérée comme étant identique, à toutes fins pratiques, à la règle en vigueur au Québec et au Canada.

[181]  Comme c'est le cas au Canada, le plaideur peut faire admettre le document numérique pour établir un fait matériel sous l'exception à la règle du ouï-dire portant sur les dossiers d'entreprises. Cette règle, telle qu'en vigueur dans la plupart des juridictions aux États-Unis, est exprimée dans la règle 803(6) des Federal Rules of Evidence. Sont donc admissibles, malgré la règle contre le ouï-dire:

[182]  "Rule 803. Hearsay Exceptions; Availability of Declarant Immaterial

The following are not excluded by the hearsay rule, even though the declarant is available as a witness:

[...]

(6) Records of regularly conducted activity. A memorandum, report, record, or data compilation, in any form, of acts, events, conditions, opinions, or diagnoses, made at or near the time by, or from information transmitted by, a person with knowledge, if kept in the course of a regularly conducted business activity, and if it was the regular practice of that business activity to make the memorandum, report, record, or data compilation, all as shown by the testimony of the custodian or other qualified witness, unless the source of information or the method or circumstances of preparation indicate lack of trustworthiness. The term "business" as used in this paragraph includes business, institution, association, profession, occupation, and calling of every kind, whether or not conducted for profit."93

[183]      Cette règle est manifestement exprimée en termes suffisamment larges pour permettre d'admettre le document numérique, et sous réserve de la preuve de fiabilité, le rapport rédigé par Doris dans notre exemple serait certainement admissible sous l'empire de cette exception à la règle sur le ouï-dire. Le seul débat important qui subsiste dans la jurisprudence américaine portant sur les documents numériques et la règle sur le ouï-dire tourne sur la question de l'ampleur de la preuve requise pour établir la fiabilité du système informatique qui est à la source du document numérique. La tendance aux États-Unis, qui ressort de la majorité de la jurisprudence, se veut une tendance vers l'admissibilité du document numérique sur preuve prima facie de l'authenticité du document en laissant la question de la fiabilité du système informatique au juge du mérite comme un critère affectant la force probante du document numérique.94 C'est essentiellement le même débat qui a présentement cours à la Conférence sur l'harmonisation des lois au Canada que nous avons vu précédemment et la même tendance vers la fiabilité du système comme facteur dans la force probante au lieu d'être un facteur clé de l'admissibilité du document numérique.

[184]  En droit canadien et québécois, le plaideur qui réussit à franchir la règle sur le ouï-dire doit ensuite satisfaire à la règle de la meilleure preuve. Son homologue américain doit faire de même. Nous serons en mesure de constater toutefois que sa tâche est quelque peu plus facile car la codification de cette règle aux États-Unis est d'une souplesse telle que la règle ne pose plus d'obstacles au document numérique.

[185]  La codification fédérale des règles de preuve maintient une expression classique de la règle de la meilleure preuve à l'article 1002 voulant que lorsqu'un écrit est proposé en preuve, c'est l'original qui doit être produit. La souplesse nécessaire est instaurée à deux niveaux. Dans un premier temps, dans les définitions du mot "écrit", du mot "original" et du mot "double exemplaire" qui se trouvent à l'article 1001:

[186]  "Rule 1001. Definitions

For purposes of this article the following definitions are applicable:

(1) Writings and recordings. "Writings" and "recordings" consist of letters, words, or numbers, or their equivalent, set down by handwriting, typewriting, printing, photostating, photographing, magnetic impulse, mechanical or electronic recording, or other form of data compilation.

[...]

(3) Original. An "original" of a writing or recording is the writing or recording itself or any counterpart intended to have the same effect by a person executing or issuing it. An "original" of a photograph includes the negative or any print therefrom. If data are stored in a computer or similar device, any printout or other output readable by sight, shown to reflect the data accurately, is an "original".

(4) Duplicate. A "duplicate" is a counterpart produced by the same impression as the original, or from the same matrix, or by means of photography, including enlargements and miniatures, or by mechanical or electronic re-recording, or by chemical reproduction, or by other equivalent techniques which accurately reproduces the original."95

[187]  Vient s'ajouter à ce schéma deux autres règles qui permettent de faire la preuve de l'écrit lorsque l'original ne peut être produit:
[188] "Rule 1003. Admissibility of Duplicates

A duplicate is admissible to the same extent as an original unless (1) a genuine question is raised as to the authenticity of the original or (2) in the circumstances it would be unfair to admit the duplicate in lieu of the original.

Rule 1004. Admissibility of Other Evidence of Contents

The original is not required, and other evidence of the contents of a writing, recording, or photograph is admissible if --

(1) Originals lost or destroyed. All originals are lost or have been destroyed, unless the proponent lost or destroyed them in bad faith; or

(2) Original not obtainable. No original can be obtained by any available judicial process or procedure; or

(3) Original in possession of opponent. At a time when an original was under the control of the party against whom offered, that party was put on notice, by the pleadings or otherwise, that the contents would be a subject of proof at the hearing, and that party does not produce the original at the hearing; or

(4) Collateral matters. The writing, recording, or photograph is not closely related to a controlling issue."96

[189]  La codification des règles de preuve au fédéral97 est reprise en termes essentiellement semblables dans les Uniform Rules of Evidence rédigés par le National Conference of Commissioners on Uniform State Laws. Cet organisme a été fondé en 1892 pour favoriser l'harmonisation des lois des divers états américains.98 Il existe donc une assez bonne harmonisation des règles de preuve aux États-Unis, de sorte que les dispositions des Federal Rules of Evidence citées ci- dessus peuvent être vues commes des règles d'application générale aux États-Unis même si tous les états n'ont pas adopté les Uniform Rules of Evidence.99 Un exemple demeure l'état de New York:
[190]  "Federal and state rules of evidence contain similar exceptions to the hearsay and best evidence rules because the Federal government and most states have adopted uniform laws containing standard provisions for the legal admissibility of records. [...] New York State has not adopted the Uniform Rules of Evidence, but it has enacted the two older, well-established and more general rules of evidence to provide exceptions to the hearsay and best evidence objections.

[...]

The New York State Rules of Evidence, part of the New York State Civil Practice Law and Rules (CPLR), incorporates the Uniform Business Records as Evidence Act (CPLR 4518) and the Uniform Photographic Copies of Business and Public Records as Evidence Act (CPLR 4539) for overcoming the hearsay and best evidence objections. These statutes address the admissibility of records in all formats, including records that have been created and filed electronically."100

[191]  Malgré le fait que l'état de New York n'ait pas adopté la codification uniforme, ses lois admettent quand même en preuve le document numérique. 

[192]  La preuve de l'acte juridique

[193]  Nous avons vu que la loi sur la preuve ne pose pas vraiment d'obstacles sérieux pour la preuve du document numérique comme tel aux États-Unis. Mais si le document numérique a pour mission de constater un acte juridique, comme c'est le cas du message envoyé par Andrée, il faut souvent que le plaideur soit en mesure de satisfaire au Statute of Frauds qui demeure en vigueur dans de nombreux états.101 Cette disposition de la loi requiert, là où elle trouve application, que le contrat de vente de biens soit constaté par un écrit signé par la personne à laquelle le contrat est opposé.102 Le Statute of Frauds peut donc être considéré semblable à ce qui s'applique en pareille matière dans les provinces du Canada autres que le Québec. Cette règle est l'équivalent de la règle contenue dans l'article 1235 du Code civil du Bas-Canada.103

[194]  La formulation la plus générale est celle qui se retrouve dans l'article 2 de la Uniform Commercial Code qui est en vigueur dans tous les états américains, sauf la Louisianne:104

[195]  "U.C.C. - ARTICLE 2 - SALES

PART 2. FORM, FORMATION AND READJUSTMENT OF CONTRACT

§ 2-201. Formal Requirements; Statute of Frauds.

(1) Except as otherwise provided in this section a contract for the sale of goods for the price of $500 or more is not enforceable by way of action or defense unless there is some writing sufficient to indicate that a contract for sale has been made between the parties and signed by the party against whom enforcement is sought or by his authorized agent or broker. A writing is not insufficient because it omits or incorrectly states a term agreed upon but the contract is not enforceable under this paragraph beyond the quantity of goods shown in such writing."105

[196]  Dans le cas de notre exemple, la valeur de la transaction dépasse de loin le seuil minime de la dispense généralement applicable sous les Satute of Frauds pour les transactions de petite valeur.106

[197]  Cette exigence de l'écrit signé pose un problème de taille pour le plaideur américain. Ici, la loi statutaire, contrairement à ce que nous avons vu dans la codification de la loi sur la preuve, ne fournit pas de définitions larges et libérales des notions d'"écrit" et de "signature". Le plaideur doit donc faire valoir un argument par analogie aux développements technologiques passées. La jurisprudence a su accepter le télégramme et ensuite le télex comme satisfaisant l'exigence de l'écrit et a fait preuve de la même flexibilité par rapport à la signature étant même disposée à accepter une en-tête de lettre comme étant une "signature" valable pour les fins du Statute of Frauds.107

[198]  Le passage suivant souligne bien la tendance des tribunaux américains dans l'interprétation des exigences de l'écrit et de la signature (passage cité par Me Horning108):

[199]  "We think and we hold that when the parties to an oral contract agree that the oral contract shall be tape recorded, the contract is 'reduced to tangible form" when it is placed on the tape. We do not overlook the requirement for signature contained in the statute, but the clear purpose of this is to require identification of the contracting party, and where, as here, the identity of the oral contractors is established, and, in fact, admitted, the tape itself is enough. So when we hold that even if the signed correspondence is insufficient to get around the statute [which it isn't], the tape recording of the oral contract would be 'a reduction to tangible form' under the provisions of the UCC. Probably the opposite result would be required under historical statutes of frauds which do not contain the tangible form language of this somewhat unusual definition of the word 'written'. However under this statute, we think the tape recorded agreement meets the requirements."109
[200]  Quoique des doutes subsisteront sur la question de savoir si dans tous les cas le document numérique satisfait aux exigences de type Statute of Frauds aux États-Unis110 (comme c'est le cas au Canada dans les provinces de common law), il semble que dans le cas précis de notre exemple, le message d'Andrée pourrait satisfaire à ces exigences.111

[201]  Les incertitudes qui tournent autour de l'exigence de l'écrit signé risquent de faire abolir cette exigence bientôt. Les commissaires de la National Conference of Commissioners on Uniform State Lawson ont publié un projet de révision de l'article 2-201 de la UCC qui abolirait carrément l'exigence de l'écrit signé.112

[202]  Par ailleurs, plusieurs états ont soit adopté ou sont en voie d'adopter des lois générales sur la signature électronique ou numérique qui, inspirées de la Loi modèle de la CNUDCI,113 font réputer le document numérique un écrit admissible comme tel à toutes fins que de droit lorsque celui-ci porte la signature numérique.114 Nous verrons plus loin comment la technique de la signature numérique peut servir à la fois à authentifier et à assurer l'intégrité des données dans un système informatique.115 Pour les fins de cet exposé du droit américain en vigueur, il suffit de mentionner qu'un mouvement est sur pied pour adopter de telles lois car le déploiement de l'infrastructure nécessaire pour permettre un recours efficace aux signatures numériques en est encore à ses premiers pas. Ces lois ne font pas l'unanimité parmi les législateurs américains, certains croyant que l'intervention législative, comme celle de l'état de Utah,116 est trop étroitement liée à une technologie particulière et risque ainsi de figer le droit par rapport à un domaine où la désuétude court à très grands pas. Dans la mesure où de telles lois étaient adoptées partout, elles auraient sans doute pour effet d'éliminer tous les doutes par rapport aux documents numériques en tant qu'écrits.117

[203]  En sus des lois d'application générale sur l'admissibilité des documents numériques, des lois sectorielles commencent à voir le jour qui traitent du sujet pour des fins particulières. A ce titre, il est intéressant de voir la réglementation publiée en mars 1997 par le Food and Drug Administration du gouvernment fédéral américain qui est destinée à mettre en place une infrastructure juridique qui permettra au FDA de dématérialiser à la fois ses archives et les demandes qui lui sont présentées pour accréditation dans le cadre de sa juridiction. Cette réglementation vise l'équivalence complète entre le document sur support papier et le document numérique.118

[204]  La situation en Europe

[205]  C'est le droit civil qui règne en Europe. Aux termes de ce droit civil, le document numérique affronte, comme ailleurs, des difficultés soulevées par la notion d'"écrit" et de "signature". Le professeur Yves Poullet signale que la seule définition en droit civil européen du mot "écrit" se trouve dans le code de procédure allemand et cette définition large et libérale entend comme écrit "toutes formes d'expression directement lisibles", c'est-à-dire que le système soit capable de reproduire l'information quasi-instantanément et dans une forme directement lisible.119 Le professeur Poullet signale également une jurisprudence de plusieurs pays qui exige de la signature qu'elle soit manuscrite dans tous les cas.120

[206]  Si l'on prend l'exemple des codes civils français et luxembourgeois, l'écrit est exigé121 pour la preuve des actes juridiques et des faits juridiques dont la valeur est supérieure à 5 000 francs.122 Le seul tempérament de ce principe, qui est vu comme ouvrant la porte aux transactions dématérialisées, est l'article 1348 C.c.fr. qui permet la preuve de la transaction lorsque les parties ont été dans l'impossibilité morale ou matérielle de se procurer une preuve écrite:123

[207]  "Article 1348 C.c.Fr.
Les règles ci-dessus reçoivent encore exception lorsque l'obligation est née d'un quasi-contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit, ou lorsque l'une des parties soit n'a pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique, soit a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale, par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure.
Elles reçoivent aussi exception lorsqu'une partie ou le dépositaire n'a pas conservé le titre original et présente une copie qui en est la reproduction non seulement fidèle mais aussi durable. Est réputée durable toute reproduction indélébile de l'original qui entraîne une modification irréversible du support."124


[208]  Cette approche qui refuse de reconnaître le document numérique comme un écrit, a suscité certaines critiques.125

[209]  Cependant, si l'on revient à notre exemple, le message d'Andrée serait admissible (à tout le moins en droit français), car en matières commerciales l'écrit n'est pas exigé puisque l'article 109 du Code du commerce édicte que:

[210]  "TITRE VII - DE LA PREUVE DES ACTES DE COMMERCE
Article 109
A l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu'il n'en soit autrement disposé par la loi."126


[211]  Une fois admis en preuve la valeur probante du document numérique est laissée à l'appréciation du juge:

[212]  "Or, le document électronique doit pouvoir être fiable pour emporter la conviction du juge et ne pas être remis en question par celui à qui on l'oppose."127


[213]  Si l'on jette un coup d'oeil du côté du Royaume-Uni, en quittant la tradition civiliste pour regagner le droit coutumier de common law, on est en mesure de constater une situation juridique qui se rapproche énormément de celle que nous avons constatée aux États-Unis et dans les provinces de common law au Canada. En effet, la notion de l'"écrit" a fait l'objet de réforme dans le Civil Evidence Act de 1995 de sorte que:

'document' means anything in which information of any description is recorded, and 'copy', in relation to a document, means anything onto which information recorded in the document has been copied, by whatever means and whether directly or indirectly (Civil Evidence Act 1995 s.13)
The legal definition of the term no longer bears much resemblance to its everyday meaning. Film, photographs, video tape, audio tape, computer disks, a fax, all are capable of being documents within the meaning of the Civil Evidence Act."128
[215]  Puisque le système juridique est toujours en proie au même dilemne face au document numérique, la preuve de celui-ci risque de rendre nécessaire la preuve de la fiabilité du système informatique:
[216]  "As the definition of 'document' broadens, so do the difficulties of demonstrating authenticity. While computer-generated information should be treated similarly to other records, its weight depends on its reliability and parties might need to provide information as to the security of their computer system."129
[217]  Synthèse: l'intégrité de l'information numérique

[218]  Nous sommes maintenant en mesure de constater que malgré les différences importantes entre les systèmes juridiques en vigueur un peu partout en Amérique et en Europe, les règles sur la preuve se heurtent toujours aux mêmes questions en ce qui concerne les documents numériques et qu'un thème constant s'en dégage. Ce thème, c'est que la fiabilité du système informatique supplée pour le document numérique au manque d'originalité qui l'affecte ainsi qu'à l'insécurité intrinsèque qui le caractérise.

[219]  Avant de tirer des conclusions sur les mesures que les juristes et les justiciables peuvent prendre pour faciliter l'admissibilité en preuve de leurs documents numériques, il importe de très bien comprendre l'environnement dans lequel les documents numériques existent et circulent.

[220]  La fragilité apparente du document numérique conduit naturellement et inexorablement vers la conclusion que ce document est beaucoup moins fiable que son cousin traditionnel sur support papier. Le vécu du monde numérique indique par contre une réalité tout à fait différente. Les systèmes informatiques qui servent de couveuses et d'abris pour les documents numériques tiennent compte de la fragilité intrinsèque des données et pour cette raison ils fournissent généralement un encadrement qui fait en sorte que la fiabilité des informations numérisées est en fin de compte très grande. Il serait même possible de poser l'argument que le document numérique dépasse en termes de fiabilité le document papier:

[221]  "Existing standards arguably not only meet but exceed that standard. Some courts' concern for standard equipment, reliable operation, correct repair, and the use of error-resistant procedures with computers probably reflects jurists' unease with computers more than any need for increased vigilance necessitated by their use. Peritz seems to infer untrustworthiness from his personal experience from around 1970, newspaper-inspired misconceptions about personal computers, and congressional testimony that "only 1% of computer crimes are even detected." The statement makes no sense.

Donn Parker, who studies computer crime, after describing a business' computerization of its records, admitted that the "business is probably safer from crime in many ways after installing the computer". This statement from an expert consulted for advice by those who fear for their data's security confirms the courts' view that as the Young Bros. court held, there is no reason to consider computer-generated evidence any less reliable than evidence on paper."130

[222]  Prenons plusieurs exemples tirés des situations typiques rencontrés régulièrement dans un environnement informatique et faisons la comparaison pour le document papier: 

[223]  Stockage

[224]  Tandis que le document papier, unique par son originalité, est stocké physiquement en un seul lieu (chemise de classement, classeur, parfois même une voûte), le document numérique, parce qu'il est dissociable de son support, peut être conservé en plusieurs lieux. En fait, les administrateurs de systèmes informatiques disposent généralement que les données stockées sur disques sur les lieux de l'entreprise sont généralement sauvegardées sur cassettes et ces cassettes sont généralement conservées à l'extérieur des lieux de l'entreprise par un service d'archivage. Alors qu'un sinistre peut facilement anéantir l'ensemble des informations archivées par l'entreprise sur papier, le même risque est tout à fait gérable et, à toutes fins pratiques, complètement évité dans le cas des documents numériques. 

[225]  Transmission

[226]  Lorsque nous sommes appelés à transmettre un document sur support papier, celui-ci, unique encore une fois par son originalité, doit faire le trajet physiquement avec tous les risques de perte (autant du document que du temps requis) que cela comporte. Le document numérique, parce qu'il se dissocie de son support, se transmet de façon dématérialisée. Puisque le document numérique est fragile, et puisque les risques de perte du document en transit sont aussi grands sinon plus grands dans son cas (une simple panne ou même une irrégularité dans la tension électrique suffit pour anéantir la transmission), les systèmes informatiques en tiennent compte et ils adoptent des méthodes fondées sur la grande malléabilité du document numérique pour rendre la transmission tout à fait sécuritaire.

[227]  Sans nous attarder outre mesure sur la méthodologie, la solution réside dans le découpage du document numérique en segments et la transmission des segments de façon isolée. Périodiquement au cours du transfert, les ordinateurs qui sont en communication comparent les segments envoyés contre ceux qui ont été reçus. Si la comparaison démontre qu'un segment est perdu ou corrompu, ce segment est retransmis. Ce processus de vérification s'effectue en temps réel et de façon transparente, sans intervention humaine, sur la foi de protocoles de transmission normalisés. Il en résulte une sécurité dans la transmission des données qui est de loin supérieure à la sécurité des documents sur support papier confiés au bureau de poste ou à un service de messagerie. 

[228]  Intégrité

[229]  Par intégrité, entendons la protection du document contre la destruction ou l'altération, soit accidentelle, soit intentionnelle. Dans le cas du support papier, c'est encore une fois son originalité essentielle sur laquelle nous fondons nos mesures de protection pour assurer l'intégrité du document. Nous plaçons donc le document papier dans un lieu sûr et nous contrôlons les accès afin de faire en sorte que seules les personnes dignes de confiance y aient accès. Nous nous fondons également sur cette originalité pour contrôler les altérations du document. L'altération étant reconnue comme difficile, nous croyons être souvent en mesure de la détecter en pratiquant des examens minutieux, voire microscopiques du papier et des épreuves physiques et chimiques sur sa composition et celle de l'encre utilisée pour y faire l'inscription des informations qu'il contient.

[230]  Dans le monde numérique, les solutions adoptées pour assurer l'intégrité des documents numériques sont à la fois similaires et très différentes. Il faut distinguer entre l'environnement informatique en réseau fermé, et celui en réseau ouvert. 

[231]  La sécurité des données en réseau fermé

[232]  Le réseau fermé est ni plus ni moins un environnement informatique composé d'au moins un, mais généralement de plusieurs, ordinateurs reliés ensemble par un réseau de communication qui permet un échange et un partage de documents numériques parmi les ordinateurs et les personnes qui y ont accès. Le réseau est fermé en ce sens qu'il est géré par une autorité centrale et que seules les personnes spécifiquement autorisées y ont accès.131

[233]  L'intégrité des documents numériques qui circulent en réseau fermé est assurée par des mesures visant à assurer l'intégrité du système en tant que tel. Les personnes autorisées doivent y accéder en s'identifiant au système au moyen de noms d'usager et de mots de passe. Le système a obligatoirement un ou plusieurs gestionnaires qui gèrent les permissions qui sont généralement hiérarchiques jusqu'à un certain point. Le degré de sécurité de tels systèmes varie énormément d'entreprise en entreprise et cette variété dépend du risque que court l'exploitant. La saine gestion de ce risque décidera des mesures à prendre.

[234]  Ces mesures prennent généralement les formes suivantes (24 mesures de sécurité informatique en ordre de sécurité croissant citées à titre d'exemple. Cette liste est illustrative et ne doit pas être tenue comme définitive ou exhaustive):
 

[235]  1.  La sécurité physique des systèmes

[236]  2.   l'établissement de politiques de gestion et d'encadrement du personnel visant la qualité de l'entrée des données et le respect des consignes de sécurité, de sauvegarde et d'archivage des documents numériques

[237]  3.   la protection des ordinateurs centraux et des serveurs par mot de passe

[238]  4.   la sauvegarde régulière des données

[239]  5.   la tenue de registres d'activités

[240]  6.   le maintien de logiciels anti-virus

[241]  7.   l'utilisation de piles de sûreté (UPS)

[242]  8.   l'imposition de mots de passe pour accéder au réseau

[243]  9.   l'établissement de permissions

[244]  10.  l'archivage des données hors site

[245]  11.  la gestion centrale et l'horodatage des documents numériques

[246]  12.  l'imposition du rappel pour les accès à distance (modem callback)

[247]  13.  le maintien d'une garde-barrière entre le réseau et tout réseau ouvert (firewall)

[248]  14.  l'établissement d'un plan de redressement en cas de sinistre

[249]  15.  l'imposition de mots de passe pour l'accès à chaque ordinateur ou composante du réseau

[250]  16.  l'établissement d'un système d'avertissement pour les pannes et les activités suspectes

[251]  17.  la sauvegarde et l'archivage des documents numériques sur supports inaltérables

[252] 18.  la surveillance en temps réel ou en différé des activités des usagers

[253]  19.  le chiffrement des documents numériques en archive

[254]  20.  le chiffrement des canaux de communication et des données en transit

[255]  21.  l'authentification par chiffrement des terminaux, équipements et cycles de traitement132

[256]  22.  l'identification et l'authentification des usagers par signature numérique gérée sur carte à puce

[257]  23.  l'authentification bio-métrique des personnes autorisées133

[258]  24.  le blindage des circuits et le blindage des terminaux contre la surveillance par les ondes134

[259]  Le cumul de toutes ces mesures de sécurité dans un réseau fermé ne se voit que dans le cas où le risque de panne, de vandalisme ou d'entrée illicite est très grand et où la confidentialité des données est très importante car ce cumul fait d'un réseau informatique l'équivalent en termes de sécurité d'un établissement militaire destiné à protéger les secrets d'état. Les réseaux fermés qui adoptent les mesures 16 à 24 identifiées ci- dessus seraient relativement à très rares. Un réseau informatique qui adopte les 11 premières mesures (ainsi que la mesure no.13 pour un réseau disposant d'un branchement permanent à Internet) serait suffisamment fiable pour la grande majorité des exploitations commerciales. 

[260]  La sécurité des données en réseau ouvert

[261]  La sécurité des données en réseau ouvert doit adopter une approche tout à fait différente. On entend par réseau ouvert, un réseau informatique qui n'est soumis à aucun contrôle centrale. Les accès ne sont d'aucune façon contrôlés et ne sont d'aucune façon contrôlables. L'exemple le plus parfait du réseau ouvert que nous avons présentement est l'Internet.

[262]  Dans un réseau ouvert on doit renoncer au contrôle du système en tant que tel et concentrer sur la sécurité des données. La technique employée se résume au chiffrement des données. 

[263]  Il est maintenant reconnu que les techniques de chiffrement asymétriques conviennent le mieux à assurer la sécurité des données en réseau ouvert. En particulier, l'utilisation du chiffrement asymétrique dans la technique de la signature numérique permet à la fois i) d'authentifier l'auteur ou la source d'un document numérique et ii) de s'assurer de l'intégrité du document numérique. Le passage suivant illustre la technique de la signature numérique utilisant le chiffrement à clé publique par la méthode RSA:135

[269]  -  d'autre part, le message n'a pas subi d'altération en transit. S'il en était autrement, les deux empreintes numériques du texte du message (celle qui émane du logiciel d'André et celle qui émane du logiciel de Bernard) ne correspondraient pas."137
[270]  Le chiffrement asymétrique et la signature numérique, déployés dans une infrastructure de clés publiques,138 sont en mesure d'offrir une assurance d'authenticité et d'intégrité pour le document numérique qui dépassent grandement les assurances disponibles avec le support papier.139 La beauté de la signature numérique, c'est que l'intégrité du document se constate à l'aide du document lui-même et de la clé publique de son auteur qui, dans une infrastructure de clés publiques, est un renseignement public qui est généralement et facilement disponible. L'intégrité du document numérique, authentifié par une signature numérique, est assurée en grande mesure en dépit du réseau informatique dans lequel le document est créé et conservé. En effet, hormis le cas de perte totale, et en supposant que la clé privée de signature est gérée sur un support comme une carte à puce, la sécurité relative du réseau informatique n'est pas pertinente pour évaluer l'intégrité du document numérique signé numériquement. 

[271]  Recommandations pratiques

[272]  Ce qui se dégage de cette longue analyse en droit comparé c'est que l'admissibilité du document numérique en preuve est toujours liée à la preuve à la satisfaction du tribunal de la fiabilité du ou des systèmes informatiques en cause. Nous avons également appris que cette admissibilité du document numérique demeure assujetti à des doutes résiduels dans presque toutes les juridictions sur la qualification du document numérique en tant qu'écrit au sens de la loi. Au Québec, la seule juridiction qui a à date adopté des dispositions spécifiques visant l'acte juridique constaté par un document numérique, nous avons vu que la force probante de l'acte juridique ainsi constaté laisse énormément à désirer.

[273]  Que devrait faire le justiciable qui anticipe devoir un jour faire la preuve de documents numériques? La réponse à cette question variera évidemment selon les circonstances mais il est possible de dégager plusieurs recommandations pratiques qui peuvent s'avérer utiles:

[286]  Conclusion

[287]  Les nouvelles technologies de l'information sont très prometteuses. Elles ont la capacité d'améliorer la qualité de notre travail et l'efficacité de nos services tant dans le secteur privé que dans l'administration publique. De plus en plus nous serons invités à dématérialiser les flux d'information que nous traitons dans le quotidien de nos entreprises. Déjà une vague d'information sans cesse croissante envahit nos bureaux et nos bibliothèques sous forme de cédéroms et de services d'information disponibles soit en ligne ou par Internet. Nous nous devons d'exploiter la puissance de cette technologie mais également de le faire avec intelligence et en connaissance de cause.

[288]  Les habitudes et les réflexes développés dans le monde des communications analogiques ne se transposent pas toujours très simplement dans le nouveau monde numérique. Nous devons donc repenser soigneusement nos procédés afin de nous assurer que nos attentes continuent d'être respectées malgré les adaptations que nous sommes appelés à faire. La saine gestion des documents numériques n'est qu'un exemple des nombreux défis que nous serons obligés d'affronter tôt ou tard.

[289]  Enfin le lecteur doit être conscient de la rapidité de l'évolution de la technologie. Les recommandations dont il est question dans le présent article sont donc sujettes à la même course à la désuétude que les infrastructures informatiques présentement utilisées.

[290]  L'auteur adresse le mot de la fin au législateur québécois. Il est désolant de constater que les articles 2837 C.c.Q. et suivants ne donnent pas lieu à un régime d'équivalence entre le document numérique et le document sur support papier. Les mesures de réforme du droit de la preuve en Amérique du Nord tendent toutes vers l'établissement de cette équivalence. Il serait dommage que le Québec se trouve dans une situation de désavantage par rapport à ses plus importants partenaires économiques sur une question qui deviendra sans aucun doute de plus en plus importante au fil des prochaines années, au fur et à mesure de la dématérialisation croissante des flux d'information.

[291]  Les enjeux des nouvelles technologies étaient pourtant assez bien connus avant l'adoption du Code civil du Québec. En 1988 le professeur Pierre Patenaude de l'Université de Sherbrooke mettait le législateur québécois en garde par rapport aux nouvelles technologies et les règles de preuve:

[292]  "Cependant, si malgré cette recommandation, le législateur préfère garder le premier paragraphe de cette disposition tel que rédigé à l'avant-projet de loi, il devrait s'assurer de donner au terme "écrit" une interprétation telle que vidéos et bandes sonores ainsi que rapports d'imprimantes soient considérés comme des écrits et que la signature manuscrite puisse être remplacée par de nouvelles formes de signatures telles, à titre d'exemples, les empreintes digitales, sceaux, cartes codées, "signatures" informatiques, cryptosystèmes asymétriques et même empreinte vocale, bref toute marque attestant le consentement. Que le législateur soit vigilant en s'assurant de ne pas bloquer le droit et le rendre imperméable aux développements technologiques: sa définition de la signature ainsi que celle de l'écrit doit être assez libérale pour donner ouverture à de nouvelles technologies de matérialisation de l'entente."144
[293]  Le législateur a sans doute porté attention mais a dû mal comprendre. Il y aurait lieu maintenant de corriger les lacunes de notre Code civil en regard des documents numériques.


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Journaux

Agence France-Presse, Mort à 85 ans de l'inventeur de l'ordinateur, La Presse, mercredi 20 décembre, 1995, p. D11.


NOTES DE FIN DE TEXTE

1.[Retour]      Cet article comporte la numérotation des paragraphes pour faciliter la référence en ligne lorsque publié en format numérique, comme c'est le cas de la présente version. Toutes les références aux numéros de page sont donc supprimées dans cette version de l'article.

2.[Retour]      Agence France-Presse, Mort à 85 ans de l'inventeur de l'ordinateur, La Presse, mercredi 20 décembre, 1995, p. D11. Le premier ordinateur Z2 de l'inventeur allemand Konrad Zuse fit son apparition en 1940, soit 4 ans avant le premier ordinateur attribué à l'inventeur Howard Aiken, appelé Mark 1.

3.[Retour]      C'est le cas, à titre d'exemple, des recherches dans la base de données CIDREQ de l'Inspecteur général des institutions financières du Québec faites à partir du site Internet http://www.igif.gouv.qc.ca/igif/cidreq.

4.[Retour]      L'invention de l'imprimerie en occident est généralement attribuée à Johann Gutenberg en 1450.

5.[Retour]      Nous verrons ci-dessous l'importance de cette tradition pour les juridictions occidentales en Amérique et en Europe.

6.[Retour]      La technique de la numérisation s'applique sans distinction à tous les contenus informationnelles non seulement le texte. Donc, texte, chiffres, images, sons, séquences animés, vidéo, tout se numérise. Voir Jean-Claude GUÉDON La planète cyber, Découvertes Gallimard, éditions Gallimard 1996, pp. 19 et s.

7.[Retour]      "a" à "z".

8.[Retour]      "1" ou "0" appelés "bits".

9.[Retour]      Nous verrons que notre Code civil parle en termes d'inscriptions informatisées, et qu'il existe maintes références au support électronique ou magnétique. Le support traditionnel utilisé pour le document binaire est le support magnétique. Au début il d'agissait le plus souvent de ruban magnétique, mais maintenant il s'agit généralement de disques. Nous commençons de plus en plus à voir des supports non magnétiques comme les cédéroms et les puces (circuits intégrés imprimés). Un exemple qui prendra de plus en plus d'importance étant la carte à puce.

10. [Retour]      Les juristes américains parlent de plus en plus de "records" comme étant un terme plus neutre qui vaut à la fois pour les écrits traditionnels que pour les documents numériques.

11.[Retour]      Valérie SEDALLIAN, Droit de l'Internet - Réglementation, Responsabilités, Contrats, Collection AUI, éditions Net Press, Cachan, France, 1996.

12.[Retour]      Il pourrait s'agir, selon le cas, d'un support plus ou moins permanent comme un disque ou un ruban magnétique ou un cédérom, soit encore d'une inscription plus volatile et éphémère comme l'inscription dans la mémoire vive de l'ordinateur.

13.[Retour]      Nous verrons ci-dessous une exigence presque identique qui est en vigueur dans les juridictions de common law aux termes de lois communément désignés Statute of Frauds. L'origine de l'article 1235 remonte en effet au Statute of Frauds tel qu'adopté en Angleterre en 1677. Voir F. LANGELIER, De la preuve en matière civile et commerciale, C. Théoret, éditeur, Montréal, 1895, aux nos. 613 et s., pp. 260 et s.

14.[Retour]      Cette définition de l'écrit est en fait très proche de la définition dans le Uniform Commercial Code américain où "écrit" est défini à l'article UCC §2-102(46) comme comprenant "... printing, typewriting or any other intentional reduction to tangible form." Voir ci-dessous aux paragraphes 197 et suivants et le traitement large et libéral dont ont fait preuve les tribunaux américains en pareille matière.

15.[Retour]      EDI signifie "Échange de Documents Informatisés".

16.[Retour]      Les auteurs citent Bernard AMORY et Yves POULLET Le droit de la preuve face à l'informatique et à la télématique, (1985) 2 Revue internationale de droit comparé 331, à la p. 341.

17.[Retour]      Pierre TRUDEL, Guy LEFEBVRE, Serge PARISIEN La preuve et la signature dans l'échange de documents informatisés au Québec, Les Publications du Québec, Québec, 1993, p. 18.

18.[Retour]      Jean-Claude ROYER, La preuve civile, 2ième édition, Les Éditions Yvon Blais,, no. 1245, à la p. 782.

19.[Retour]     Voir les paragraphes 217 et suivants ci-dessous.

20.[Retour]      David MASSE, Le cadre juridique en droit civil québécois des transactions sur l'inforoute, à venir (1997) 42 McGill L.J. également disponible dans une version antérieure parmi les actes du colloque annuel de 1995 de l'Association pour le développement de l'informatique juridique ("AQDIJ") à http://www.juris.uqam.ca/aqdij/ ou à http://www.chait-amyot.ca/docs/aqd95.htm.

21.[Retour]      Voir à titre d'exemple Jean-Claude ROYER, Op.cit., no 1260 à la page 788.

22.[Retour]      TRUDEL, LEFEBVRE, PARISIEN, Op. Cit., p. 64.

23.[Retour]      Jean-Claude ROYER, Op. cit., no. 332, à la p. 188; citant Borris c. Sun Life Assurance Co. of Canada B.R. 537; Bédard c. Gauthier (1941) 79 C.S. 288; Brousseau c. Rochon (1916) 22 R.L. n.s. 458; Toupin c. Vézina (1900) 9. B.R. 406; Giguère c. Brault (1894) 6.C.S. 53; A. NADEAU et L. DUCHARME, La preuve en matières civiles et commerciales, dans Traité de droit civil du Québec, t. IX, Montréal, Wilson & Lafleur, 1965, no 131; P.B. MIGNAULT, L'autorité judiciaire, 6 R.L. n.s. 145.

24.[Retour]      Voir aux paragraphes 197 et suivants ci-dessous. A noter qu'ils ont eu à interpréter une exigence statutaire ayant la même source législative que l'article 1235 C.c.B.C., c'est à dire le Statute of Frauds.

25.[Retour]      Voir la discussion sur la sécurité des données ci-dessous aux paragraphes 217 et suivants.

26.[Retour]      1233 C.c.B.C.

27.[Retour]      Voir au paragraphe 164 ci- dessous.

28.[Retour]      En anglais, le business records exception.

29.[Retour]      Jean-Claude ROYER, Op. cit., no. 730, à la p. 431.

30.[Retour]      Voir les paragraphes 51 et suivants ci-dessus.

31.[Retour]      L'auteur a déjà soulevé ce problème antérieurement. Voir David MASSE, Op. cit.

32.[Retour]      Voir à cet égard la thèse qui écarterait l'admissibilié dans le cas où l'acte juridique est constaté antérieurement à son constat dans un document numérique: Léo DUCHARME, Le nouveau droit de la preuve en matières civiles selon le Code civil du Québec, 23 R.G.D. 5, aux pages 37 à 38. La thèse majoritaire favorisant l'admissibilité est soutenu par les auteurs suivants: Pierre TRUDEL, Guy LEFEBVRE, Serge PARISIEN La preuve et la signature dans l'échange de documents informatisés au Québec, Les Publications du Québec, Québec, 1993, aux pages 23 et 24; Claude FABIEN, La communicatique et le droit civil de la preuve, dans Le droit de la communicatique - Actes du colloque conjoint des Facultés de droit de l'Université de Poitiers et de l'Université de Montréal, Montréal, Les Éditions Thémis, 1992, p. 186.

33.[Retour]      Voir les paragraphes 58 et suivants ci-dessus.

34.[Retour]      Voir les paragraphes 62 et suivants ci-dessus.

35.[Retour]      En effet, le commentaire du ministre de la justice sur cet article de droit nouveau précise que "...cette définition est suffisamment large pour comprendre par exemple un numéro de code spécifique permettant d'identifier une personne en matière d'inscriptions informatisées; en effet, la signature ne correspond pas uniquement à l'écriture qu'une personne fait de son nom."

36.[Retour]      Pierre TRUDEL, Guy LEFEBVRE, Serge PARISIEN, Op. Cit., pages 65 et suivants.

37.[Retour]      Jean-Claude ROYER, Op. cit., no. 332, à la p. 188.

38.[Retour]      Article 1235 C.c.B.C.

39.[Retour]      Article 2828 C.c.Q.

40.[Retour]      Article 2826 C.c.Q.

41.[Retour]      Article 2837 C.c.Q.

42.[Retour]      Article 2828 C.c.Q.

43.[Retour]      David MASSE, Op. cit.

44.[Retour]      Jean-Claude ROYER, Op.cit., p. 231.

45.[Retour]      Article 2839 C.c.Q.

46.[Retour]      Article 2863 C.c.Q.

47.[Retour]       Jean-Claude ROYER, Op. cit., no 409, p. 229 à l'effet que l'article 2863 C.c.Q. ne trouve pas application dans le cas du document numérique et le même auteur aux nos 1511 et suivants, pp. 919 et suivants sur l'admissibilité de la preuve contredisant les termes de l'écrit.

48. [Retour]      Voir aux paragraphes 147 et s. ci-dessous.

49. [Retour]      Comme à titre d'exemple lorsqu'il est question de protéger une partie autrement faible et susceptible aux abus. Voir l'article 264 de la Loi sur la protection du consommateur L.R. c. P-40.1, l'article 48 de la Loi sur les arrangements préalables de services funéraires et de sépulture L.R. c. A- 23.001 ou l'article 77 de la Loi sur la régie du logement L.R. c. R-8.1.

50.[Retour]      Article 2857 C.c.Q.

51.[Retour]      Voir les Articles 2832, 2843 et 2870 C.c.Q.

52.[Retour]       Jean-Claude ROYER, Op. cit., no 682, p. 402.

53.[Retour]      Pierre TRUDEL, Guy LEFEBVRE, Serge PARISIEN, Op. Cit., page 32.

54.[Retour]      Voir ci-dessous aux paragraphes 207 et s.

55.[Retour]      Voir les paragraphes 47 et suivants ci-dessus.

56.[Retour]      Articles 2832 et 2852 C.c.Q.

57.[Retour]      Article 2845 C.c.Q.

58.[Retour]      Voir les paragraphes 103 et suivants ci-dessus.

59.[Retour]     Loi sur l'assurance automobile L.R.Q. c. A-25, art. 83.19.

60.[Retour]      Voir à titre d'exemple l'article 25.3 de la Loi sur le régime des rentes du Québec L.R.Q. c. R-9, l'article 16.2 de la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec L.R.Q. c. R-5, l'article 15.4 de la Loi sur le ministère de la Sécurité du revenu L.R.Q. c. M-19.2.1 et l'article 357 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles L.R.Q. c. A-3.001.

61.[Retour]     Code de procédure pénal L.R.Q. c. 25.1.

62.[Retour]      Voir au paragraphe 203 ci- dessous.

63.[Retour]       Jean-Claude ROYER, Op. cit., no 91, p. 46.

64.[Retour]     R. c. Sunila et Solayman (1986) C.C.C. (3d) 331 (N.S.S.C.).

65.[Retour]     R. c. McMullen (1979) 47 C.C.C (2d) 499, 100 D.L.R. (3d) 671 (CA Ont.). Dans la cause de R. c. Bell et Bruce (1982) 35 O.R. (2d) 164 (confirmé par la Cour Suprême, (1985) 2 R.C.S. 287) le tribunal a admis en preuve suivant l'article 29 de la Loi sur la preuve au Canada des imprimés de documents numériques alors que le document numérique à l'origine de l'imprimé avait été supprimé du système informatique. Voir aussi R. v. Pilkington M.J. no. 93 DRS 93-09746 sur l'admissibilité de documents numériques provenant de guichet bancaires.

66.[Retour]     R. c. McMullen (1979) 47 C.C.C (2d) 499 à la p. 503.

67.[Retour]     R. c. McMullen (1979) 47 C.C.C (2d) 499 à la p. 506.

68.[Retour]     R. c. Vanlerberghe (1978) 6 C.R. (3d) 222 (CA, C.-B); R. c. Bicknell (1988) 41 C.C.C. (3d) 545.; R. c. Nayanchandra L. Shah B.C.J. no. 3869 DRS 93-07847; R. c. Dale Ivan McCulloch B.C.J. no. 2282 DRS 94-14858. Voir aussi John SOPINKA, Sidney LEDERMAN, Alan BRYANT, The law of evidence in Canada, Butterworths, Toronto, 1992 à la p. 214.

69.[Retour]     R. c. Jeffrey Glenn McWhinney M.J. No. 625 DRS 93-09527; R. v. Sheppard N.J. no. 73 DRS 95-12218.

70.[Retour]      John SOPINKA, Sidney LEDERMAN, Alan BRYANT, Op. cit., à la page 940: "The modern common law, statutory provisions, rules of practice and modern technology, have rendered the rule obsolete in most cases and the question is one of weight and not admissibility."

71.[Retour]      Citant la loi d'interprétation de la Colombie Britannique: Interpretation Act, L.R.C.-B. 1979, c. 206, art. 29, entre autres.

72.[Retour]      Citant R. c. Vanlerberghe (1978) 6 C.R. (3d) 222 (CA, C.-B) et R. c. McMullen (1979) 47 C.C.C (2d) 499. Voir ci- dessus aux paragraphes 135 et suivants.

73.[Retour]      John SOPINKA, Sidney LEDERMAN, Alan BRYANT, Op. cit., aux pages 927 et 928.

74.[Retour]     Tecoglas c. Domglas (1985) 51 O.R. (2d) 196.

75.[Retour]     Loi sur la preuve L.R.O. 1990 c. E-23.

76.[Retour]      Le texte intégral des lois refondus de l'Ontario sont disponibles à http://arezzo.CRDP.UMontreal.CA/Ontario/fr/index.html.

77.[Retour]      Le document de consultation ainsi que les autres documents préparés par le comité de la Conférence sur la preuve des documents numériques sont disponibles sur le site Internet de la Conférence en Anglais et en Français à http://www.law.ualberta.ca/alri/ulc..

78.[Retour]      Document de consultation de 1997 de la Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada, http://www.law.ualberta.ca/alri/ulc/current/felev.htm, au paragraphe 56.

79.[Retour]     Ibid., paragraphe 18. C'est également la position qui émerge en droit américain que nous verrons ci-dessous.

80.[Retour]     Ibid., paragraphe 25.

81.[Retour]     Ibid., paragraphes 39 et suivants.

82.[Retour]      Pour la situation en droit américain voir ci-dessous aux paragraphes 192 et s. En ce qui concerne la réception du Statute of Frauds en droit québécois, voir l'Article 1235 C.c.Q. et la note 13 ci-dessus.

83.[Retour]      Peter SIM, Legal problems of Electronic Data Interchange, Computer Post, 1994, A HREF="http://www.mbnet.mb.ca:80/%7Epsim/edi.html"> http://www.mbnet.mb.ca:80/%7Epsim/edi.html.

84.[Retour]     Canadian Encyclopedic Digest, 3rd edition, Carswell, Ontario, Vol. 5, Title 32, Contracts, §283.

85.[Retour]     Statute of Frauds, R.S.O. 1990 c. 519; Sale of Goods Act, R.S.O. 1990 c. S1.

86.[Retour]     Canadian Encyclopedic Digest, Op. cit., §309.

87.[Retour]     Ibid., §333, §334 et §335.

88.[Retour]      Voir aux paragraphes 47 et s. ci-dessus.

89.[Retour]     Loi d'interprétation L.R.O. 1990 c. I-11, art 29 (1).

90.[Retour]      Benjamin WRIGHT, The Law of Electronic Commerce, Little, Brown and Company, 1996, aux pp. 7:8, 7:9.

91.[Retour]     Ibid., à la p. 8:4.

92.[Retour]      Stanley KURZBAN, Authentication of computer-generated evidence in the United States Federal Courts, 35 J. Law & Tech. 437 (1995) à la p. 440.

93.[Retour]      Fed. R. Evid. 803(6), Cornell University, Lawyers Cooperative Publishing, Octobre 1996, disponible à http://www.law.cornell.edu/rules/fre/overview.html.

94.[Retour]     United States v. Vela 673 F.2d 86, procès de novo refusé 677 F.2d 113 (5th Cir. 1982); Voir Benjamin WRIGHT, Op. cit., aux pp. 9:6 et suivants; Stanley KURZBAN, Op. cit., aux pp. 441 et suivants; John KAHN, Implications of Computer Technology and Use for the Law of Evidence, 1989, http://www.accesscom.com/~jkahn/computer_evidence.html; Richard Allan HORNING, Enforceability of Contracts Negotiated in Cyberspace, texte d'un article présenté le 30 janvier 1997 au colloque annuel RSA Data Security Conference à San Francisco, dont l'auteur a un exemplaire, étant une version mise-à-jour d'un article antérieur intitulé Has HAL signed a contract: the statute of frauds in cyberspace, disponible parmi les actes du colloque Le droit des autoroutes de l'information et du multimédia à http://www.iway.fr/groupecx/uae/96/Horning.html/.

95.[Retour]      Fed. R. Evid. 1001.

96.[Retour]      Fed. R. Evid. 1003, 1004.

97.[Retour]      Federal Rules of Evidence.

98.[Retour]      Voir http://www.kentlaw.edu/ulc/brochure.html.

99.[Retour]      Benjamin WRIGHT, Op. cit., à la p. 9:3; Stanley KURZBAN, Op. cit., à la page 438, note 3.

100.[Retour]      New York State Archives and Records Administration, Guidelines for the Legal Acceptance of Public Records in an Emerging Electronic Environment, University of the State of New York, 1994 aux pp. 7 et 8, disponible à http://www.sara.nysed.gov.

101. [Retour]      Raymond NIMMER, Information Law, Warren, Gorham & Lamont, 1996, pp. 12:44 et s.; Richard HORNING, Op. Cit., pp. 3 et s.

102.[Retour]     Ibid.

103.[Retour]      Voir la note 13 ci-dessus.

104.[Retour]      Benjamin WRIGHT, Op. cit., à la p. 16:5.

105.[Retour]      UCC §2-201, disponible à http://www.law.cornell.edu/ucc/ucc.table.html.

106.[Retour]      Richard HORNING, Op cit., à la page 16.

107.[Retour]      Benjamin WRIGHT, Op. cit. aux pp. 16:1 et s., particulièrement à la p. 16:7 où figure un tableau résumant la jurisprudence sur les questions d'écriture et de signature; Voir aussi, Raymond NIMMER, Op. cit., à la p. 12:49; Richard HORNING, Op. cit., pp. 21 et s. et la jurisprudence y citée, particulièrement l'arrêt A & G Constr. Co. v. Reid Bros. Logging Co.547 P.2d 1207 (Alaska 1976).

108.[Retour]      Richard HORNING, Op. cit., à la p. 28.

109.[Retour]     Ellis Canning Company v. Bernstein 348 F.Supp. 1212 (D. Colo. 1972).

110.[Retour]      Raymond NIMMER, Op. cit., à la p. 12:49.

111.[Retour]      Raymond NIMMER, Ibid.; Richard HORNING, Op. cit. à la p. 34; Benjamin WRIGHT, Op. cit. à la p. 16:22

112.[Retour]      Raymond Nimmer, Op. cit. à la p. 12:47; Voir le projet de révision de la UCC sur le site de la National Conference of Commissioners on Uniform State Laws à http://www.kentlaw.edu/ulc/.

113.[Retour]      Voir ci-dessus aux paragraphes 147 et s.

114.[Retour]      Pour une description de la signature numérique et son application possible en droit québécois, voir Pierre TRUDEL, Guy LEFEBVRE, Serge PARISIEN, Op. Cit., et David MASSE, Op. Cit.

115.[Retour]      Voir ci-dessous aux paragraphes 263 et s.

116.[Retour]     Utah Digital Signature Act, Utah Code Annotated Title 46, Chapter 3 (1996)

117.[Retour]      Pour une documentation très complète sur la signature numérique, tant dans sa dimension technologique que dans sa dimension juridique incluant l'état de la législation américaine sur la signature numérique ("digital signature"), voir Serge PARISIEN, Pierre TRUDEL, Véronique WATTIEZ-LAROSE, L'identification et la certification dans le commerce électronique, Les éditions Yvon Blais, 1996. Voir également le site Internet de la division de technologie de l'état de Masschussets à http://www.magnet.state.ma.us/itd/legal. Pour une discussion des risques de responsabilité des parties participantes dans une infrastructure de clés publiques voir Michael FROOMKIN, The essential role of trusted third parties in electronic commerce 75 Oregon L. Rev. 49 (1996) disponible à http://www.law.miami.edu/~froomkin/articles/trusted.htm; C. Bradford BIDDLE, Misplaced Priorities: The Utah Digital Signature Act and Liability Allocation in a Public Key Infrastructure, 33 San Diego L. Rev., disponible en une version antérieure à http://www.SoftwareIndustry.org/issues/1digsig.html; David MASSE, Economic Modelling and Risk Management in Public Key Infrastructures, texte d'une conférence présentée au colloque RSA Data Security Conference le 31 janvier 1997 à San Francisco, disponible à http://chait-amyot.ca/docs/pki.html.

118.[Retour]      21 C.F.R. Pt. 11 Electronic Records; Electronic signatures - le 20 mars 1997 aux pages 13429 et s. du No. 54 du Vol. 62 de la partie II du Federal Register.

119.[Retour]      Yves POULLET, Droit de la preuve: de la liberté aux responsabilités, texte d'une conférence présentée au colloque annuel de 1992 de l'Association québecoise pour le développement de l'informatique juridique, disponible à http://www.juris.uqam.ca/aqdij/.

120.[Retour]     Ibid., s'agissant en l'occurrence de la Belgique, du Danemark, du Portugal et de l'Allemagne.

121.[Retour]      Article 1341 C.c. fr.

122.[Retour]      Anne DE LA PRESLE, Vers la reconnaissance juridique des transactions faites par EDI, texte d'une conférence présentée au colloque annuel de 1992 de l'Association Québecoise pour le développement de l'informatique juridique, disponible à http://www.juris.uqam.ca/aqdij/.

123.[Retour]      Yves Poullet, Op. cit.; Valérie SEDALLIAN, Op. cit. à la p. 202.

124.[Retour]     Code civil français, disponible en texte intégral à http://www.fdn.fr/~rabenou/civil.html.

125.[Retour]      Yves POULLET, Op. cit.

126.[Retour]     Code du Commerce de la France, disponible en texte intégral à http://www.fdn.fr/~rabenou/com.html.

127.[Retour]      Valérie SEDALLIAN, Op cit., à la p. 206.

128.[Retour]      Steve UGLOW, Kent School of Law - Lectures on the law of evidence, en voie de publication dans Law of Evidence: Text and Materials, Sweet and Maxwell, disponible en plein texte à http://snipe.ukc.ac.uk/law/spu/document.htm.

129.[Retour]     Ibid.

130.[Retour]      Voir l'analyse intéressante à cet égard dans l'article de Stanley KURZBAN, Op. cit., pp. 453 et s.

131.[Retour]      A remarquer que de nos jours le réseau fermé comprend le réseau de grande envergure et que dans certains cas les communications de données empruntent parfois un réseau ouvert, comme c'est le cas des réseaux privés virtuels (virtual private networks), des intranets et des extranets. Dans ces cas, les canaux de communication passant par un réseau ouvert sont toujours chiffrés.

132.[Retour]      Un tel système généralement reconnu pour les réseaux fermés étant le système Kerberos, mis au point par le Massachussets Institute of Technology pour leur propre réseau informatique et depuis devenu une norme pour la sécurité informatique des réseaux informatiques (RFC 1510). Voir à cet égard la description du fonctionnement de ce système dans Jeffrey SCHILLER, Secure Distributed Computing, Scientific American, Novembre 1994, à la p.72; B. Clifford NEUMAN, Theodore TS'O, Kerberos: An authentication Service for Computer Networks, Institute of Electrical and Electronics Engineers, IEEE Communications Magazine, Vol. 32, no.9 pp. 33-38 et disponible à http://nii.isi.edu/publications/kerberos-neuman-tso.html.

133.[Retour]      Il s'agit ici de techniques de reconnaissance de la voix, de la physionomie, d'empreintes digitales ou de la rétine.

134.[Retour]      Les équipements informatiques émettent des ondes en fréquence radio (rf) qui peuvent être captées pour reconstituer, entre autres, les activités de la personne au clavier.

135.[Retour]      La méthode RSA est nommée pour les professeurs Ron Rivest, Adi Shamir et Leonard Adilman qui ont inventé le chiffrement asymétrique qui porte leurs initiales. Cette technique est maintenant commercialisée sous brevet par la société américaine RSA Data Security Inc. Une application généralement disponsible, et ce gratuitement, est le logiciel de chiffrement asymétrique Pretty Good Privacy ou simplement "PGP". Voir pour plus de renseignements http://www.rsa.com ou http://www.pgp.com.

136.[Retour]      Selon la littérature de RSA Data Security Inc.: "The RSA Digital Signature employs a cryptographic "hashing" algorithm to create a message digest that is unique to each document, much like a fingerprint. If even a single bit of the document is changed, roughly 50% of the bits in the corresponding message digest will change. Furthermore, the hashing algorithm is a one-way function: the document content cannot be reconstructed from the bits of the message digest. With RSA's MD family of message digest algorithms - featuring 128-bit message digests - the probability that different documents will have the same message digests by coincidence is less than 1 in a trillion trillion, effectively ensuring that two message digests will only match if their source documents are bit-for-bit identical."

137.[Retour]      David MASSE, Op. cit. à la note 20 ci-dessus.

138.[Retour]      Voir David MASSE, Op. cit. à la note 117.

139.[Retour]      David MASSE, Op. cit. à la note 20 ci-dessus

140.[Retour]      Benjamin WRIGHT, Op. cit., aux pp. 6:4 et s.

141.[Retour]      Terry COOK, It's 10 o'clock: do you know where your data are?,http://snyside.sunnyside.com/cpsr/government_info/info_access/PROFS_CASE/PROFS_Case_Canadian_Exper ience; Voir la norme nationale du Canada en matière d'archivage sur support informatique et photographique, CAN/CGSB- 72.11-M92, Office des normes générales du Canada; Benjamin WRIGHT, Op.cit., aux pp. 6:1 et s.

142.[Retour]      Pierre TRUDEL, Guy LEFEBVRE et Serge PARISIEN, Op.cit., pp. 98 et s.; Voir le contrat type québécois commenté pour l'échange de documents informatisés préparé par Me Karim BENYEKHLEF et Vincent GAUTRAIS, Contrat type d'échange de documents informatisées, disponible sur le serveur Internet du Centre de Recherche en Droit Public de l'Université de Montréal, http://www.droit.umontreal.ca.

143.[Retour]      Comme Pretty Good Privacy (http://www.pgp.com) ou le logiciel Entrust de Northern Telecom (http://entrust.com).

144.[Retour]      Pierre PATENAUDE, Commentaires sur l'avant-projet de réforme au Code civil au chapitre de la preuve: de l'importance de ne pas imposer législativement une fin de non-recevoir aux moyens techniques modernes de la matérialisation des volontés, (1988) 19. R.D.U.S. 31, à la p. 35.


© David Masse - Mai 1997